Le 17 novembre 2016 à 21h20, heure locale, l’astronaute français Thomas Pesquet et ses coéquipiers ont décollé à bord du Soyouz MS-03, direction la Station spatiale internationale. Partis pour une mission de 6 mois à quelques 400 kilomètres au-dessus de la Terre, ces aventuriers de l’espace devront mener à bien diverses activités scientifiques. Explications sur cette expérience hors du commun.
Thomas Pesquet : un Français dans l’espace
Thomas Pesquet est né à Rouen, le 27 février 1978. Diplômé de l’Institut supérieur de l’Aéronautique et de l’Espace (ISAE-SUPAERO) de Toulouse en 2001, il est sélectionné en 2004 pour suivre le programme de formation des pilotes de ligne d’Air France. Il obtient sa licence en 2006 et, après 2300 heures de vol à son actif, devient instructeur sur l’A320.
Saxophoniste, sportif accompli, fou de littérature, polyglotte (il parle 6 langues), l’homme est hyperactif. Et touche-à-tout.
C’est en 2008 que se présente la chance de sa vie, alors que l’Agence spatiale européenne (ESA) lance, pour la troisième fois, une campagne de recrutement. Sur 84 143 candidats, seuls 6 sont retenus. Dont Thomas. Commence alors une formation intensive qui s’achève en novembre 2010.
Il travaille ensuite depuis le centre de contrôle des missions comme responsable des communications avec les astronautes durant les vols, et occupe en parallèle un rôle important au sein du Centre des astronautes européens (EAC), pour lequel il s’occupe des nouveaux partenaires comme la Chine.
A cette formation initiale s’ajoute un entraînement complémentaire en Europe, en Russie et aux Etats-Unis, ainsi qu’avec la Station spatiale internationale (ISS). Il prend également part à des missions sous-marines, dont une organisée par la NASA en 2012.
C’est en 2014, le 17 mars précisément, que Thomas est affecté à la mission Proxima, une mission de six mois qui s’achèvera en mai 2017. Il officie en tant qu’ingénieur de bord.
Il est le dixième Français à s’envoler dans l’espace, et le quatrième Français à séjourner à bord de la Station spatiale internationale ; il est toutefois le premier à devoir mener à bien une mission aussi longue.
Pour rappel : la première femme française à être allée dans l’espace s’appelle Claudie Haigneré. Son séjour a duré 16 jours. Elle est la première femme astronaute de l’ESA.
L’ESA, une organisation fondamentale pour la recherche scientifique
L’ESA, Agence spatiale européenne, est une organisation intergouvernementale qui rassemble 22 Etats membres : 20 membres de l’Union européenne, auxquels s’ajoutent la Norvège et la Suisse. Sept autres Etats membres de l’Union ont également signé des accords de coopération avec l’ESA ; le Canada participe également à certains programmes.
L’article 2 de la Convention de l’ESA, conclue à Paris le 30 mai 1975, évoque la mission principale de l’Agence : “Assurer et développer, à des fins exclusivement pacifiques, la coopération entre États européens dans les domaines de la recherche et de la technologie spatiale et de leurs applications spatiales.”
Pour ce faire, elle dispose d’un budget annuel de plus de 5 milliards d’euros (5.2 milliards en 2016). Les Etats membres en sont les principaux contributeurs, puisqu’ils financent l’organisation à hauteur de près de 4 milliards d’euros ; l’Allemagne et la France sont d’ailleurs les deux plus gros donateurs, chacun assurant plus de 20% du financement total.
Le siège de l’ESA se trouve à Paris, c’est donc là-bas que se décident les programmes et les missions. Toutefois, l’Agence spatiale européenne dispose de différents centres disséminés à travers toute l’Europe.
En 2014, 2233 personnes travaillaient pour l’ESA, dont près d’un quart de Français.
“Les projets de l’Agence sont conçus pour en apprendre davantage sur la Terre, sur son environnement spatial immédiat, sur le système solaire et sur l’Univers ainsi que pour mettre au point des technologies et services satellitaires et pour promouvoir les industries européennes.“
L’ESA mène à cet effet des missions pionnières : le 14 janvier 2005, la sonde Huygens a réalisé l’atterrissage le plus lointain jamais accompli, en se posant à quelques 1427 millions de kilomètres du Soleil. Le 6 août 2014, la sonde Rosetta est devenue la première à se placer en orbite autour d’une comète, permettant ainsi à son module Philae d’atterrir à la surface de la comète pour y recueillir des données.
L’Agence conduit également des activités d’observation de la Terre, et a construit différents satellites chargés de surveiller son climat, son atmosphère, ses océans.
L’ESA voit sur le temps long, puisque des missions sont d’ores et déjà programmées pour les deux prochaines décennies. Le programme Euclid de 2020 aura ainsi pour objet d’étude la matière noire et l’Univers en expansion, tandis que 2034, un Observatoire des ondes gravitationnelles, permettra d’étudier les phénomènes d’oscillations dans le tissu de l’espace-temps.
Proxima : un symbole fort pour une mission capitale
La mission Proxima tire son nom de l’étoile la plus proche du Soleil [Proxima du Centaure]. Le nom a été choisi à la suite d’un concours organisé par l’ESA en 2015, parmi plus de 1300 propositions.
Le nom et le logo de la mission ne sont pas anodins et renferment une très forte symbolique : le -x- de Proxima fait référence au chiffre 10, puisque Thomas est le dixième astronaute Français à se rendre dans l’espace ; les 3 lignes verticales en couleur sont à la fois un rappel de la forme de la Station spatiale internationale, et un dernier clin d’oeil au drapeau français.
La mission Proxima est principalement axée autour de la connaissance du corps humain, de la physique et de la biologie dans l’espace. Les scientifiques espèrent par exemple, à travers elle, en apprendre plus sur les compétences cognitives et motrices, sur les os et la santé musculaire d’un corps humain dans l’espace. Thomas contribuera ainsi à 62 expériences mises en place par l’ESA et par le Centre national d’études spatiales (CNES) afin de permettre l’étude de l’impact des vols spatiaux sur les êtres humains. Il prendra également part à des expériences d’envergure internationale qui impliqueront notamment les agences spatiales américaine, canadienne et japonaise.
Deux autres astronautes l’accompagnent dans son voyage [une capsule Soyouz ne pouvant transporter au maximum que trois astronautes] vers la Station spatiale internationale.
Le premier, Oleg Novitsky, est de nationalité russe. Il est pilote, instructeur de parachutisme militaire, et officiera en tant que commandant du Soyouz.
Peggy Whitson fait quant à elle partie des astronautes les plus expérimentés de la NASA, avec à son actif deux missions déjà réalisées, 376 jours passés dans l’espace, et 39 heures de sortie extravéhiculaire.
A noter que 6 astronautes se relaient en permanence au sein de la Station spatiale internationale.
“Participer à l’exploration spatiale est pour moi un engagement envers l’avenir. Nous devons bien sûr penser au présent et mieux nous occuper de la Terre et de ses habitants, mais il ne faut pas pour autant négliger le futur.”
Pour aller plus loin :
* Une présentation de l’Agence spatiale européenne en janvier 2016
* Le site officiel de l’ESA
* Une présentation complète de la mission Proxima
* Le Facebook et le blog de Thomas Pesquet
Alexandra Jouanneau