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Les Crimes de Grindelwald – Quand la magie cède le pas au Box Office.

En novembre 2016, sortaient Les animaux fantastiques, premier volet d’une toute nouvelle saga dérivée de l’univers d’Harry Potter, et surtout, adaptation non pas d’un roman mais d’un livret-goodie destiné à l’origine à prolonger le succès du petit binoclard. Une ambitieuse tentative commerciale donc, qui se soldera tout de même par 814 millions de recettes et un oscar, mais réussira avant tout l’exploit de rendre Poufsouffle sexy, et de donner un nouvel élan à une communauté potterhead ravie de découvrir enfin le monde magique en-dehors de Poudlard. Le succès semble d’ailleurs au rendez-vous pour sa suite, Les Crimes de Grindelwald, qui connait déjà un très bon démarrage (320 000 entrées en France le jour de sa sortie contre 210 000 il y a deux ans). Mais ce second opus tient-il ses promesses ?

Un casting de qualité

La saga porte le nom des Animaux fantastiques pour une bonne raison : le bestiaire éponyme imaginé par J.K. Rowling émerveille toujours par sa diversité et son réalisme. La scène de début montrant la maison de Norbert et les créatures qu’elle abrite est d’ailleurs un régal pour les yeux. Mais toute cette ménagerie passe progressivement au second plan de l’intrigue et reviendra par la suite pour détendre une atmosphère parfois trop sombre ou sérieuse. On appréciera notamment les quelques apparitions de niffleurs, botrucs et de l’imposant dragon chinois qui se promène dans Paris. Seul bémol : les chats du ministère de la magie français, qui font penser à des Pokémon bas de gamme.

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Mais heureusement, le casting bipède n’est pas non plus en reste. Contrairement à Ralph Fiennes, dont le Voldemort multipliait les grimaces et les accès de colère, Johnny Depp, qui pourtant est habitué aux travestissements et extravagances en tout genre, propose un Grindelwald très sobre mais efficace, son regard glacial suffisant à sa crédibilité. Son rival, Dumbledore, est quant à lui incarné par Jude Law, un choix parfait pour la flegme et l’ironie requises par le personnage.

Eddie Redmayne, de son côté, maintient un Norbert Dragonneau maladroit et attachant, qui sait néanmoins garder son sérieux lorsque la situation l’impose. On appréciera notamment sa lucidité par rapport à Dumbledore, qui envoie toujours les autres prendre des risques à sa place – une bouffée d’air frais par rapport  au jeune Harry Potter qui lui vouait une admiration aveugle.

Un opus trop ambitieux par son contenu …

Mais mêmes les meilleurs acteurs ne peuvent masquer les faiblesses de l’intrigue, causées notamment par une volonté de satisfaire les fans autant que possible en multipliant les références à la saga Harry Potter.

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Cela passe notamment par l’introduction de personnages ayant un fort potentiel mais qui n’apportent absolument rien à l’intrigue en l’état. On découvre par exemple Nagini, jeune femme condamnée par une malédiction à se transformer en python géant, et qui deviendra par la suite l’animal de compagnie de Voldemort : un personnage d’apparence fascinante, mais qui se contente tout au long du film de suivre Croyance comme son ombre, ce qui, au final, n’a aucune utilité. La même remarque s’applique à Nicolas Flamel, plus qu’anecdotique alors qu’il est évoqué dès L’École des sorciers. Avoir la main lourde sur les références est une chose, les justifier est déjà plus difficile.

A trop vouloir en rajouter, JKR s’emmêle les pinceaux et crée même des incohérences avec la saga d’origine, Minerva McGonagall à Poudlard alors qu’elle n’était même pas née, et Dumbledore devenu professeur de DCFM (enseignée à l’époque par le professeur Têtenjoy, le futur directeur se chargeant quant à lui de la métamorphose …) en sont les exemples les plus flagrants. Des détails de puristes ? Peut-être. Qui énervent bien des fans ? Sans aucun doute.

… qui détournent l’attention de sérieuses faiblesses scénaristiques (spoilers)

Au final, on en vient à se demander si ce foisonnement de références étouffe une vraie intrigue, ou s’il est justement là pour détourner l’attention d’un scénario plutôt léger.

Une des principales trames de l’histoire repose sur la quête d’identité de Croyance, et le fait qu’il est peut-être l’héritier disparu de la famille Lestrange. Une question sensée tenir le spectateur en haleine tout au long du film, qui introduit pour cela les personnages de Yusuf Kama et Leta Lestrange… pour au bout du compte y apporter une réponse qui n’a rien à voir. Quel dommage, d’ailleurs, de caster une actrice aussi talentueuse que Zoë Kravitz, commencer à développer un personnage respirant la noirceur et la complexité, pour lui faire connaître une fin aussi expéditive…

En revanche, l’ascension de Grindelwald, censé être le fil conducteur de toute la saga, reste très peu développée malgré des rebondissements majeurs. Difficile par exemple de comprendre sa présence à Paris ou le recrutement de Queenie.

Comment expliquer cette superficialité ? Est-ce à imputer au choix de la production d’étirer l’histoire sur cinq films et non trois, comme prévu à l’origine ? Ou est-ce simplement le caractère transitoire d’un deuxième opus qui laisse présager davantage de réponses pour la suite ? Car, à défaut d’apporter suffisamment de réponses, l’issue des Crimes de Grindelwald soulève bien des questions.

Un troisième opus attendu au tournant (spoilers)

Le prochain film devra donc éclaircir un certain nombre de points – un défi de taille, qui lui laisse cependant un fort potentiel en termes de contenu.

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Lors de la scène finale, on apprend que Croyance n’est non pas un Lestrange, mais Aurélius, le frère caché d’Albus Dumbledore. Cette révélation peut devenir très intéressante pour l’intrigue à venir, en raison de la relation entre Albus et Gellert, mais devra s’accompagner d’une explication très solide. Un écueil possible serait notamment la chronologie : Kendra, la mère d’Albus, est morte en 1899, alors qu’en 1926, Croyance sort à peine de l’adolescence. Les scénaristes pourraient cependant s’en dépêtrer en misant sur le Perceval, le père. Peut-être n’est-il pas mort à Azkaban ? Aurait-il pu concevoir un enfant pendant sa captivité, comme Bellatrix Lestrange ? Il serait aussi intéressant d’exploiter le fait que sur une fratrie de quatre, deux soient devenus des obscurus…

Outre la famille Dumbledore, on attend davantage de détails sur le passé de Grindelwald et sa relation avec Albus. Quelles sont les origines de son idéologie ? Comment expliquer sa blessure à l’œil – un duel avec Dumbledore ? Quelle est l’étendue de ses pouvoirs ? Comment fait-il pour voir dans le futur ?

Se pose également la question de la manière dont les prochains films traiteront la Deuxième Guerre Mondiale : y a-t-il un lien avec Grindelwald ? Comment le monde des sorciers sera-t-il affecté par le conflit ?

Autant de questions que la saga des Animaux fantastiques ne pourra se permettre d’éviter, au risque de redevenir ce qu’elle était à l’origine : un produit commercial sans grand intérêt.

Joséphine Coadou