J’ai choisi d’étudier au Japon pendant un an pour me confronter et m’adapter à l’inconnu. Et pour une immersion réussie, quoi de mieux que la capitale nippone ? Aire urbaine la plus peuplée du monde avec ses 43 millions d’habitants, Tokyo est une ville extraordinaire. Au croisement de l’ultra-moderne et de l’hyper-traditionnel, elle stimule toutes les curiosités.
L’arrivée à Tokyo
J’ai atterri au Japon au début du mois de septembre. Ma carte de résidente m’attendait à l’aéroport. Tous les documents administratifs sont à préparer bien en amont du départ, dès le mois de février, à peine les attributions de 3A annoncées. Compléter le dossier d’inscription est assez pénible mais cela donne un premier aperçu de la rigueur administrative japonaise. En arrivant à Tokyo aux dates et horaires précisés par l’université partenaire Waseda, des navettes gratuites sont organisées pour conduire les nouveaux étudiants depuis l’aéroport vers leur résidence universitaire, appelée dormitory. C’est très pratique, d’autant plus que l’aéroport international Narita se situe à plus d’une heure et demie du centre de Tokyo en transports et que le fonctionnement du métro est assez effrayant au premier abord. C’est aussi agréable de se laisser porter par les organisateurs, après de longues heures de vol et le choc du dépaysement.
Le dormitory
J’habitais dans la résidence Hoshien, avec plus d’une centaine d’autres étudiants venus des quatre coins du monde. La candidature pour intégrer cette résidence de la fac se fait en ligne, au début de l’été, en répondant à un questionnaire assez obscur. Il y a trois buildings différents, un grand (douze étages) et deux petits (environ cinq). Les chambres sont fonctionnelles, les cuisines et salles de douche partagées, les toilettes également parfois. C’est le meilleur endroit pour faire des rencontres ! Tout le monde se rejoint dans la salle commune de la résidence. C’est très convivial. En revanche les règles de la résidence sont trop strictes, mais facilement transgressées…
Hoshien se situe à dix minutes à pied de l’université, ce qui est un vrai luxe permettant d’éviter le métro matinal plein à craquer (au sens propre du terme). Il y a un Konbini (épicerie japonaise ouverte 24/7) à deux pas, et les rues principales des alentours regorgent de super restaurants à prix très abordables. C’est ce qui est cool au Japon, on ne cuisine jamais. Enfin, le centre de Shinjuku se situe à une bonne demi-heure de marche, ou vingt minutes de métro. Sinon, je recommande vivement le vélo pour se déplacer à Tokyo. C’est bien plus rentable en temps et en argent et c’est aussi magnifique de se promener, surtout la nuit, au milieu des néons multicolores. En revanche, habiter dans le centre de Tokyo a un prix et les loyers sont élevés. Ceux des chambres d’Hoshien varient entre 550€ et 650€ par mois.
L’université
Fondée en 1882 par l’ancien Premier ministre Okuma, Waseda est une université très réputée au Japon. Vous aurez le droit aux applaudissements des Japonais chaque fois que vous leur direz que vous étudiez là bas. Plus de 7 000 étudiants internationaux y sont inscrits chaque année. Au début de chaque semestre, quelques semaines sont banalisées pour le choix des cours. Les étudiants font des voeux en ligne, assistent aux cours qu’ils pensent choisir (très important pour repérer quel prof parle un anglais compréhensible), et se voient attribuer certains cours, ou non.
La vie au Japon
La vie au Japon est extrêmement agréable. On prend vite goût à la mentalité nippone et le choc culturel n’est pas difficile à surmonter. Le principal obstacle qui m’a rendu la vie difficile à mon arrivée est la barrière de la langue. Mon cas est particulier puisque je ne parlais pas un mot de japonais. Tout devient soudainement compliqué et je ne comprenais plus rien à ce que je pouvais voir ou entendre. Mais très vite, on prend ses marques, on utilise beaucoup Google Translate sous toutes ses formes écrite, vocale ou photo et on y arrive. Ça fait partie du voyage ! Malgré toute la frénésie de Tokyo, il y règne une tranquillité incomparable. Tout est harmonieux car les Japonais sont très respectueux, des autres et des règles.
C’est d’ailleurs amusant d’essayer de les imiter. Il faut marcher alignés, du bon côté de la route, parler doucement dans le métro et faire la queue avant de monter dedans, ne pas manger en marchant au risque de salir la rue, même chose avec les cigarettes. Les règles de bonne conduite sont incalculables et parfois étonnantes. Par exemple, mieux vaut éviter de se moucher en public, c’est très mal vu. Personne n’importune personne, de jour comme de nuit, et ce climat de sécurité est vraiment plaisant. Tokyo est d’ailleurs réputée pour être une des villes les plus sûres au monde. Alors, on fait facilement confiance et on oublie trop souvent son téléphone dans les toilettes publiques, c’est véridique. C’est donc une mégalopole très attrayante pour sa qualité de vie. Il ne faut pas craindre l’effervescence des salariés qui grouillent dans les avenues principales aux heures de pointe. Aussi surprenant que cela puisse paraître, on marche souvent seul dans les rues de Tokyo. Tournez les talons vers la première des petites rues adjacentes aux grands axes : le vide et le calme sont instantanés. C’est magique. Même chose avec les nombreux parcs et jardins qui sont de véritables havres de paix.
Tokyo
Comparés au reste des Japonais, les Tokyoïtes peuvent paraître plus stressés dans leur vie de tous les jours, mais ils n’en demeurent pas moins extrêmement chaleureux et bienveillants. Ils sont toujours impressionnés et heureux d’entendre les étrangers parler Japonais. Il arrive souvent que des personnes âgées viennent nous demander notre origine ou que des jeunes essaient de discuter dans un anglais assez approximatif tard dans la nuit. D’ailleurs, la culture de la fête et de l’alcool est quelque chose de très surprenant à découvrir à Tokyo… vous verrez. Chaque quartier de Tokyo est unique et a sa propre atmosphère. Alors, la ville paraît encore plus immense et les découvertes infinies. Entre tradition et modernité, chacun s’exprime. Ainsi, les kimonos se mêlent aux costumes-cravates et les temples shinto aux gratte-ciel.
Ginza est le quartier des affaires, Shinjuku le coin shopping, Shibuya le quartier des clubs, Ueno le coin des musées, Asakusa des temples, Roppongi pour les expats et Harajuku pour les hipsters. Mais il y en a tellement d’autres ! Vous ne vous lasserez jamais de vivre dans cette mégalopole. Il y a tant à visiter qu’une année n’a même pas suffi… L’endroit le plus magique pour observer Tokyo reste le haut d’un building, au moment du coucher du soleil, en espérant apercevoir au loin le Mont Fuji. Aussi, il est évidemment très facile de partir explorer les alentours et le reste du Japon depuis Tokyo. Les trains et Shinkansen vont rapidement partout, les bus (de nuit) sont plus lents mais moins chers.
Évidemment, ce court article ne permet pas de révéler toute la complexité de la société Japonaise. Aussi, je ne veux pas spoiler vos futures découvertes si vous avez la chance d’étudier un jour à Tokyo. Même s’il est ouvert, le Japon reste un pays fermé auquel il est difficile (j’en ai même personnellement conclu impossible) de s’assimiler. On reste un étranger dans une société dont on pense comprendre certains codes, mais on se saura finalement jamais s’incliner de la même façon qu’un vrai Japonais pour dire merci. Même si Tokyo est ultra-moderne et mondialisée, les traditions restent prégnantes. C’est un mélange très stimulant intellectuellement.
Il me paraît fondamental d’être curieux pour vivre un an à Tokyo et appréhender cette société multidimensionnelle. C’est comme un mystère à résoudre, saisir comment on peut être en même temps si globalisé et si spécifique. C’est une expérience incroyable. On apprend évidemment beaucoup et on fait des milliers de découvertes. Écouter les histoires des Japonais si affectueux, goûter à l’incroyable gastronomie, boire du matcha pour vivre centenaire, découvrir les combats de sumos, le théâtre kabuki, les dizaines de matsuri et autres traditions, appréhender la vie de la plus grande ville du monde et toute la modernité qu’elle suscite… Après 324 jours passés au Japon, mon plus beau souvenir est d’avoir été surprise par quelque chose de nouveau, d’inconnu ou de différent chaque jour. C’était une année d’émerveillements.
Camille Frambot
Propos recueillis par Mona Sabot