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Interview listes CA #1 : Avenir SPL : « l’envie de représenter les étudiants est plus grande que la peur des critiques »

Cette semaine, La Manufacture passe au crible les trois listes étudiantes candidates pour les élections au Conseil d’administration (CA) de notre IEP. À chaque fois la même formule, deux de nos rédacteurs, face à trois membres de la liste. L’occasion pour parler, pendant près d’une heure de leurs projets et de leurs ambitions.

Le hasard a désigné la liste “Avenir SPL” à se présenter la première dans nos colonnes. Un entretien avec Mary Plancq (4A) et tête de liste, Romane Lacroix (2A) et 2ème de liste, ainsi que François-Xavier Noire (1A) et 7ème de liste. Une interview au cours de laquelle nous avons pu les interroger sur leur statut de liste apartisane, ainsi qu’aborder les points clefs qui rythmeront l’année. 

« On n’a pas de ligne politique du tout »  – François-Xavier Noire

Dès les prémices de notre entretien, c’est le terme de « liste apartisane » qui s’impose. « Les engagements politiques au sein de la liste, ils sont vraiment mis de côté, du fait que c’est vraiment une liste pour le Conseil d’Administration. On n’est pas là pour exprimer nos idéaux politiques mais vraiment pour être à l’écoute des étudiants. » Une considération pour la fonction d’élu étudiant au CA comme un simple intermédiaire entre les étudiants et l’administration qui sera véritablement le fil rouge de notre entretien : « défendre les intérêts des étudiants avant tout », « une liste qui représente les étudiants et seulement les étudiants » et même « on n’a pas de ligne politique du tout ». Le ton est donné.

« J‘ai voulu m’engager parce que je trouvais qu’il y avait un climat de malveillance l’année dernière et les années précédentes » – Mary Plancq

Pour pouvoir faire entendre la voix des étudiants, il s’agit déjà de la connaître. L’année dernière, la liste Avenir SPL a ainsi beaucoup essayé de communiquer avec les étudiants via les réseaux sociaux. Un mode de fonctionnement qui semblait bien pratique pour toucher le plus grand nombre d’étudiants mais qui a rapidement montré ses limites d’après Romane Lacroix : « je ne pense pas que c’était quelque chose qui était voulu mais à travers les réseaux sociaux les gens ne se rendent pas compte des mots qu’ils peuvent employer. »

C’est d’ailleurs ce point qui a poussé Mary Plancq à franchir le pas et à s’engager : « j’ai voulu m’engager parce que je trouvais qu’il y a avait un climat de malveillance l’année dernière et les années précédentes qui m’a extrêmement gênée et en m’engageant en temps que tête de liste cette année, j’aimerais vraiment changer ça et essayer de faire en sorte que les débats soient apaisés, qu’on puisse discuter d’idées »

C’est le climat anxiogène de l’arène des réseaux sociaux sociaux à l’IEP qui est regretté : « on lance des mots et en fait ce n’est plus des réponses c’est des clashs ». Ce qui a amené la liste Avenir SPL à faire le choix de ne plus répondre aux étudiants sur Facebook personnellement, mais uniquement avec la page (afin d’éviter que des élus se fassent attaquer directement).

La liste Avenir SPL préfère ainsi cette année favoriser le débat hors réseaux sociaux : « c‘est très important pour nous qu’on ait un dialogue face à face et plus par réseaux sociaux parce que les réseaux sociaux bloquent un véritable dialogue ». Un  pôle communication et dialogue a d’ailleurs été spécifiquement créé cette année afin de faire le lien.

Les réunions participatives pour encourager le débat

Le constat d’Avenir SPL est sans appel : « les étudiants ne se sentent pas du tout entendus dans l’école ». Un constat qui semble unanimement partagé à l’image des nombreuses  réunions participatives organisées par toutes les listes. S’il n’y a pour le moment pas énormément d’étudiants, les échanges demeurent constructifs. « Il en ressort beaucoup de revendications » expliquent-ils. Ils l’annoncent d’ailleurs d’ores et déjà : ils vont continuer le principe de réunions participatives tout au long de l’année.
« On a vu que c’était très positif même s’il y a avait peu d’étudiants pour le moment. On pense qu’au fur et à mesure de plus en plus de gens vont se sentir concernés. »
Et c’est pour Romane Lacroix, la meilleure manière pour « faire jaillir des mesures ». À ces réunions consultatives, Avenir SPL souhaite également ajouter une permanence chaque jeudi en cafetéria, afin de « permettre aux étudiants de venir nous voir spontanément, on est là pour entendre les étudiants, les écouter et dialoguer avec eux ». 

Nous avons ensuite pu aborder quelques unes des thématiques qui seront à coup sûr phares cette année, une meilleure reconnaissance de l’engagement associatif, l’écologisation de l’IEP,  la lutte contre toutes les discriminations, la réforme des masters, la réforme des frais d’inscription.

La reconnaissance de l’engagement associatif à l’IEP

Comme le rappelle Mary Plancq, « il faut pas oublier que le jeudi après midi banalisé, c’est déjà une énorme avancée ». L’idée ne serait donc pas de proposer un nouveau temps entièrement dédié aux associations, ce qui serait impossible, mais plutôt d’encourager une certaines souplesse au niveau des absences. En effet, même si on parle maintenant”d’absences tolérées”, il reste difficile de savoir exactement ce que recouvre ce terme. C’est dans cette voie qu’Avenir SPL veut faire progresser les choses: « on veut avoir quelque chose de clair, précis, marqué quelque part, pour savoir réellement ce à quoi on a droit en tant qu’engagé dans les associations ». Cette clarté est d’ailleurs le maître-mot de l’ensemble de leur projet :  « on n’est pas là pour amuser les étudiants, faire un milliard de vidéos, un milliard de visus, on veut relayer les informations de manière claire, nette, précise. » Cela passe par « un climat de transparence », entre l’administration et les élus étudiants, et ensuite entre les élus et l’ensemble des étudiants de l’IEP.

Des « crédits associatifs » avaient été évoqués les années précédentes, afin de rendre concrète la reconnaissance de l’engagement associatif, et d’en faire une composante à part entière du parcours universitaire. Ce n’est pas du tout l’idée d’Avenir SPL, qui ne veut pas « encourager l’opportunisme associatif » . Cependant, ils défendent l’idée d’un « certificat qui validerait des compétences, à caractère officiel » qui pourrait  ensuite être reconnu lors d’entretiens professionnels.

L’écologisation de l’école

Face à une nouvelle liste, Alter’éco, qui a mis le sujet de l’écologie au cœur de son programme et de sa campagne, il nous semblait nécessaire d’interroger Avenir SPL sur leur vision du développement durable au sein de l’IEP. Bien sûr,  « rendre l’école plus verte » se retrouve dans les points importants de leur engagement, mais comme le rappelle Mary Plancq : « on n’est pas une association écolo, et on sait qu’il y a des associations écolos qui s’occupent de ces sujets là et qui le font très bien au sein de l’école ».

L’idée est donc de porter ces thèmes au CA, et d’aider en tant qu’élus étudiants les associations qui le demandent. Romane Lacroix est d’ailleurs revenu sur le travail fait par Avenir SPL l’année dernière sur ce sujet : « On sait qu’il y a des choses que l’on va pas pouvoir faire en temps qu’élu étudiant, donc on va pas se fatiguer à les mettre sur la table ». Elle prend notamment l’exemple du chauffage : il était impossible de mettre en place immédiatement une régulation, puisque l’ensemble de l’établissement fonctionnait par un chauffage centralisé. La proposition était donc techniquement irréalisable, et il fallait du temps pour que cela se mette en marche. Dans la même lignée, quantité de sujets n’ont pas été réalisables l’année dernière.

Ils profitent de cette question pour rappeler la fonction essentielle du CA : être « un lieu de vote ». Malgré la fausse image répandue d’un lieu de discussion, chaque CA s’organise autour d’un ordre du jour, et il faut y venir avec des projets prêts de A à Z pour qu’ils soient soumis au vote. Un brin provocante, La Manufacture s’interroge alors sur la réelle utilité des élus étudiants, dans un processus de décision qui semble un peu figé. C’est Romane Lacroix qui nous répond, en rappelant que le CA n’est que le  « point d’aboutissement ». La force de notre école, c’est de donner neuf voix aux étudiants. Les élus étudiants ont tout un travail à accomplir avant le CA.

« Être élu étudiant c’est pas seulement le CA, c’est aller rencontrer les membres de l’administration en dehors du conseil, discuter de nos projets, voir la faisabilité de ceux-ci »Romane Lacroix

La lutte contre toutes les discriminations

Après l’écologie et Alter’éco, la discussion s’oriente autour de l’autre liste, SUD, qui met au coeur de son engagement l’inclusion et la lutte contre toutes les discriminations. La plus grande modération d’Avenir SPL pourrait laisser penser à une un peu moins ardente défense des droits des étudiants. En entendant
« modération », Mary  Plancq coupe immédiatement :  « je pense que c’est facile d’apparaître plus modérés ». Romane Lacroix développe : SUD a  « une manière de faire, ils ont le droit de faire comme ça, mais ce n’est pas la manière de faire ». Mary Plancq défend la vision d’Avenir SPL qui entend s’inscrire dans une  « dynamique collaborative, un dialogue avec l’administration » . La démarche de SUD ne peut pas fonctionner optimalement, puisqu’elle ne cherche pas le dialogue avec l’administration, ce que cette dernière regrette, jugeant que la liste SUD présente de  « très bonnes idées ».

La réforme des masters

Point chaud de cette année : la réforme des masters. Déjà lancé, le projet de réforme doit pouvoir « associer tous les étudiants ». D’après Mary Plancq,  « l’avantage c’est que Avenir SPL s’est saisi de cette question l’année dernière, en prévision, donc on a déjà une base pour travailler ». Et de rappeler la mise en place d’une réunion participative sur ce sujet la veille qui fut « une discussion très productive ». Et justement, que sort-il de cette réunion ?

En trois mots, Avenir SPL réclame « plus de transparence sur les parcours, plus d’opportunités, et des parcours plus personnalisés ». Ils déplorent notamment le manque d’information des étudiants à propos des possibilités qui leur sont offertes en 5A, et le manque de choix de cours : l’idée serait une « piscine de cours électifs » plus large, par laquelle les étudiants pourraient construire leur parcours à leur image.

Il apparaît également d’après eux de plus essentiel d’établir formellement la « possibilité de partir en césure », ainsi que « l’ouverture de l’alternance à d’autres majeures ». Les professeurs et les ambassadeurs de majeurs sont en train de travailler le projet, il sera ensuite soumis aux étudiants, qui auront la possibilité d’y demander des modifications. L’idée pour Avenir SPL est donc de comprendre les attentes des étudiants, afin d’adapter leur réponse.

La question des masters rejoint celle de l’établissement d’un diplôme de Bachelor. Par rapport à ce point, Mary Plancq note l’attachement très fort de l’école au diplôme en 5 ans, qui en fait le prestige, tandis que certains étudiants se sentent enfermés dans le cursus. La réponse à cela serait donc de  « faire de meilleurs masters ». Une solution pragmatique. Avenir SPL va cependant encourager la délivrance à chaque étudiant rentrant de 3A un certificat de licence de 3 ans, qui est nécessaire pour certains stages notamment, et qui est aujourd’hui délivré au cas par cas.

Les frais d’inscription

Cette question est abordée à partir de la proposition de SUD de supprimer les frais d’inscription. Romane Lacroix y répond:  « Je ne sais pas si supprimer les frais de scolarité serait une bonne chose pour l’école ». Les frais d’inscription permettent un cadre de vie, des conditions d’études qui sont  « exceptionnelles ». Des frais toujours plus progressifs sont néanmoins à encourager, mais pas de suppression en vue dans l’esprit d’Avenir SPL.

Cette thématique recouvre aussi celle du rapprochement avec l’Université de Lille, que certains souhaiteraient voir évoluer en fusion. Romane Lacroix rappelle qu’en cas de fusion,  « on perd le statut de grande école. Si on a passé un concours, c’est que les étudiants tiennent au diplôme de Sciences Po »

Mary Plancq résume donc  « On n’est pas du tout pour la fusion ». Cependant, le rapprochement est nécessaire, notamment pour le laboratoire de recherche. Avenir SPL aimerait encourager dans le cadre de ce rapprochement l’élaboration de double-diplômes, peut-être en droit.

Le Bilan : quel Avenir SPL au CA ?

Avenir SPL met en avant son bilan, et entend s’appuyer sur sa petite expérience acquise l’année dernière. L’organisation de la liste par pôles cherche à inclure tous les membres tout au long de l’année : chacun travaillera sur son sujet, et participera à la préparation du CA, même s’il n’est pas élu. « Ce qui fait la force d’une liste, c’est de pouvoir travailler à 9, avec des idées venant des différentes promos »

« On veut pas annoncer des propositions qu’on pourra pas réaliser, vraiment s’appuyer sur du concret ».

Le cœur du projet d’Avenir SPL apparaît être le dialogue. Dialogue au sein de la liste d’abord, dans une « liste  unie », où chacun amène ses idées pour définir ensuite une ligne optimale à défendre. Dialogue entre les listes ensuite : Romane Lacroix souligne l’expérience et la connaissance de SUD pour la commission d’aide sociale par exemple, Mary Plancq le projet écologique  « impressionnant » d’Alter’éco. Il est impossible pour eux de « de faire cavalier seul » : « Ce n’est pas en se divisant qu’on va réussir à représenter les étudiants ».

Dialogue avec les étudiants enfin, par la mise en place de permanences, de réunions participatives, et par un dialogue franc et sans l’entremise des réseaux sociaux. Conscients des critiques à venir, la liste Avenir SPL affirme ne pas en avoir peur. François-Xavier Noire les considèrent même comme essentielles : « l’envie de représenter les étudiants est plus grande que la peur des critiques. On est prêt aux critiques, puisque seront des critiques constructives, donc dans le sens des étudiants ».

Le dernier mot de l’entretien sera pour Mary Plancq, qui encourage tout le monde à aller voter, et surtout à s’informer hors des « on dit », en prenant par exemple part aux réunions participatives.

Rendez-vous donc le 14 novembre pour le débat, le 21 pour l’élection, et en attendant, sur le site de La Manufacture (demain et jeudi) pour les interviews des deux autres listes déclarées.

Chloé Michel & Matthieu Slisse