Dans le cadre de sa campagne pour la Primaire Populaire, le député européen Pierre Larrouturou était invité cette semaine à Sciences Po Lille. Cette rencontre, organisée par les associations Visions d’Europe, Homoécolorectus et La Ruche, a connu un grand succès et a permis au député écologiste à la fois d’alerter sur la problématique du dérèglement climatique, mais aussi d’appeler à la mobilisation citoyenne dans l’optique des prochaines élections présidentielles. Ce premier candidat invité cette année à Sciences Po se voulait grave, mais sans être dénué d’optimisme pour l’avenir.
Une bataille pour le climat
Il ne s’agissait pas d’une simple conférence pour lui. Pour Pierre Larrouturou, ce rendez-vous devait davantage être un débat d’idées sur la question de l’avenir et du choix qui semble aujourd’hui s’imposer aux citoyens face à l’urgence de la question du climat. Cet avenir, il passe une heure entière à le dépeindre, debout face à l’amphi quasiment plein, et il ne semble, à première vue, pas réjouissant. Existe-t-il vraiment un « monde d’après » ? Sera-t-il différent de celui d’avant ? Sommes-nous vraiment capables de changer les choses concernant le climat ? Une série de courbes et de graphiques s’enchainent, relatant des faits que trop connaissent, malheureusement, déjà. L’augmentation des émissions de CO2, la question des incendies et des feux de forêts ainsi que des pics de chaleur que le monde a connu cet été, tant d’exemples qui attestent pour lui de l’urgence de la situation.
C’est une véritable bataille que Pierre Larrouturou semble vouloir mener, et il est prêt à employer des méthodes sortant de l’ordinaire pour ce combat. Sa dernière grève de la faim en est un exemple. Bien décidé à pousser le Parlement Européen à relancer les négociations concernant le projet de taxe sur la spéculation, le député a cessé de s’alimenter pendant 18 jours en novembre 2020. Une initiative qui lui a offert une couverture médiatique qu’il qualifie d’« inattendue » pour une question de budget européen.
« Je suis à la recherche d’alliés »
Mais le député européen ne s’est pas contenté de dresser un simple tableau quelque peu déprimant de la situation, « il n’y a pas de fatalité » selon lui. Sans se priver de critiquer les politiques économiques de Bruno Lemaire ou d’exprimer sa déception concernant les mesures prises par Emmanuel Macron pour le climat, il reste cependant persuadé que la situation peut encore s’améliorer. Pour cela, il faut « une équipe » déterminée à la tête du pays, et des « alliés » pour défendre les idées écologistes. Son désir d’union, aussi bien politique que citoyen, s’exprime à plusieurs reprises durant son intervention. Une gauche unie, voilà le genre d’équipe que Pierre Larrouturou espère et cherche à rendre possible avec la Primaire Populaire.
Cette élection primaire initiée par des militants indépendants a en effet pour but de choisir un candidat commun pour la gauche. Dix candidats, quatre hommes et quatre femmes, ont été sélectionnés via un processus de parrainage qui s’est déroulé de juillet à octobre. Parmi eux, François Ruffin, Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot, Gaël Giraud et Pierre Larrouturou pour les hommes et Anna Agueb-Porterie, Clémentine Autain, Anne Hidalgo, Charlotte Marchandise et Christiane Taubira chez les femmes. Mais pour l’heure, seuls trois candidats ont officiellement déclaré leur candidature à cette primaire. Pierre Larrouturou était donc bien en campagne à Sciences Po cette semaine, et n’a pas hésité à partager ses projets et ses solutions pour le climat s’il parvenait à l’Elysée.
Un amoureux de Roosevelt
Ce qui semble avoir été apprécié dans son intervention par les personnes présentes dans l’assistance, ce sont justement ces propositions pour le climat qui relevaient davantage de questions économiques et sociale, dont il est un spécialiste en tant que rapporteur général du budget européen. Pour Pierre Larrouturou, le meilleur moyen de lutter contre le réchauffement climatique c’est l’argent.
Le nerf de la guerre c’est l’argent parait-il, ainsi si la lutte contre le réchauffement est une bataille il semble logique que le député envisage avant tout une politique économique d’ampleur. Avec l’Europe, Pierre Larrouturou veut avant tout augmenter les financements dédiés à l’écologie et au climat qui sont largement insuffisants.
C’est la somme qui serait nécessaire selon le député pour lutter efficacement contre le réchauffement climatique à l’échelle de l’Union Européenne. Une somme considérable émergeant des conclusions de son rapport en tant que contrôleur du budget européen, intitulé « Ep report on the sustainable Europe investment plan ». Ce rapport est celui mettant en avant la proposition de taxe sur la spéculation, qui pourrait rapporter plusieurs milliards d’euros par an au financement de la lutte pour le climat, mais restant pour l’instant en stand-by en raison d’un refus de la part du gouvernement français et du ministre de l’Économie Bruno Lemaire. Ce serait donc la France qui bloquerait les négociations, un constat contre lequel Pierre Larrouturou n’a pas manqué de s’insurger face à l’audience.
En réponse à une telle inaction climatique, Pierre Larrouturou se veut le représentant d’une « Nouvelle Donne », du nom de son parti politique. La référence au « New Deal » de Roosevelt est ici facile à identifier. Comme l’a fait l’emblématique président américain face à la crise de 29 et à ses effets, Pierre Larrouturou souhaiterait une politique économique relevant davantage de justice sociale. La « semaine de 4 jours », le Pacte Climat-Emploi, la taxe sur la spéculation, autant de propositions cherchant toutes à allier écologie, finance et emploi.
Si son admiration pour Roosevelt a quelque peu fait sourire, le caractère concret de ses propositions a semblé séduire. Et bien que l’avenir du candidat dans la course à la présidentielle via la Primaire Populaire reste incertain, sa détermination et son engagement paraissent sans failles. Mais les véritables acteurs de la lutte pour le climat pour lui restent nous, les étudiants, les jeunes, la jeunesse en général pour qui il voue une grande admiration. « C’est l’une des choses qui me donne le plus d’espoir » m’a-t-il confié, traduisant ainsi une confiance qui confortera surement les convictions des plus déterminés et des plus engagés.
Margot Denis