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Rencontre avec Benoît Bréville : ses conseils aux futurs journalistes

La semaine dernière, nous recevions rue Angellier le journaliste Benoît Bréville, directeur de la rédaction du journal Le Monde Diplomatique, pour une conférence du Jeu de l’Oie. À l’issue de son intervention, La Manufacture demanda quels seraient ses conseils à destination des étudiants qui souhaitent se lancer dans le journalisme. Voici sa réponse :

« Je lui donnerais le conseil de se spécialiser dans quelque chose, d’avoir un domaine de compétence particulier qui le distingue. Que ça soit l’international, l’économie, l’écologie, quelque chose qui se valorise comme étant un élément de distinction dans le milieu des journalistes car la plupart des formations dans les écoles sont très généralistes et forment un petit peu les gens à parler de n’importe quel sujet donc j’aurais tendance à conseiller de se spécialiser pour se distinguer, pour ne pas être interchangeable avec un autre journaliste, avoir une compétence spécifique à apporter puisque c’est vraiment l’enjeu d’avenir pour la presse.

C’est ce qu’on peut voir dans le groupe Axel Springer qui a récemment annoncé qu’il voulait supprimer un quart ou un tiers* de ses effectifs de journalistes, qui seraient devenus obsolètes à l’heure de l’intelligence artificielle, parce que toutes les tâches plus ou moins automatisables, qui peuvent être réalisées par un robot ou un logiciel, pourront à l’avenir, avec les progrès de l’intelligence artificielle, être remplacés par des machines. Il y a cette idée de ne garder de journalistes humains que ceux qui font des grandes enquêtes, de l’investigation, qui ont une vraie plus value à apporter aux journaux par leurs compétences spécifiques. Par conséquent, même si ce que prévoit de faire le groupe Axel Springer est un exemple un peu extrême, il traduit un peu l’évolution et l’avenir de la presse : ça va être, à mon avis, un marché très clivé entre d’un côté des journalistes dits “tâcherons”  qui bâtonneront des dépêches AFP, qui reliront ce qu’ont fait des robots et qui a mon avis seront assez mal payés pour ça et d’un autre coté des journalistes qui auront une compétence spécifique à valoriser sur un certain nombre de domaine.

Le conseil que j’aurais à donner à un jeune journaliste, c’est d’identifier le domaine qui a priori est un domaine d’avenir, qui a un intérêt et aussi -c’est très important- pour lequel l’étudiant a un intérêt personnel, parce qu’on est d’autant meilleur pour un sujet qu’on apprécie et qui donne envie de se renseigner dessus pour le plaisir, pour l’hygiène intellectuelle et pas seulement pour mettre une ligne sur son CV. Donc d’identifier le bon thème au croisement entre ses intérêts et ce que le “marché” est susceptible de valoriser à l’avenir. »

* La rédaction n’a malheureusement pas été en capacité d’obtenir des chiffres précis sur ce sujet, les sources auxquelles nous avons eu accès ne faisant état que de plusieurs centaines de licenciements sur 3400 journalistes sans en dire plus.

 

Hippolyte Andrieu-Rebel

crédit photo : pigiste.org

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