Mercredi 11 octobre 2017 s’est tenue la première conférence organisée par l’association « L’Arène de l’IEP » sur le thème de « l’État d’urgence permanent » avec pour conférenciers les députés France Insoumise, Danièle Obono et Ugo Bernalicis. Elle fut notamment diffusée en direct sur le compte YouTube de ce dernier. Après une rapide présentation des invités par Aurélien Lecoq, le représentant du groupe France Insoumise à Science Po Lille, la conférence a été lancée par Ugo Bernalicis afin d’exposer leur point de vue sur ce qui, pour eux, tend à une “démocrature”.
Le jour même avait été adopté par l’Assemblée nationale le projet de loi-antiterrorisme (que je vous invite à consulter). Ce projet de loi du gouvernement en procédure accélérée vise à « renforç[er] la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme » et par la même occasion permettre l’arrêt de l’état d’urgence qui se termine au 1er novembre prochain après six prorogations. Composé de dix articles, ce projet de loi traite de différents aspects de la sécurité intérieure, remettant notamment en question les libertés, comme l’article 2 à propos des fermeture de lieux de culte, qui est subversif pour la liberté de culte comme l’a développé Danièle Obono. Cet article, a-t-elle affirmé, encourage l’amalgame entre religion et terrorisme, en ciblant la question des lieux de culte dans cette loi. Toujours selon les députés France Insoumise, cela sert la propagande des organisations terroristes qui revendiquent leurs actes au nom de leur religion; et cet article ne fait qu’aller dans cette direction, ainsi que dans celle des organisations auditionnées lors des commissions pour cette loi, comme le syndicat des Avocats. L’article 10, aussi mis en avant par la députée FI, cible la question de l’immigration et non des actes terroristes, sachant que la menace est endogène (c’est à dire que la source n’est pas extérieure à la cible et qu’elle est imprévisible), ainsi cet article participe à la pratique du contrôle au faciès et à la xénophobie. De plus, il ne traite pas de la libre circulation de petits colis qu’utilisent notamment certains individus pour se constituer un véritable arsenal.
Quelle efficacité réelle de l’Etat d’urgence et des lois anti-terrorisme ?
Les députés de la France Insoumise et les députés du parti Les Républicains ont donc voté contre ce projet, ces derniers ayant également présenté une motion de rejet préalable qui n’a pas été adoptée. Danièle Obono et Ugo Bernalicis étaient missionnés sur cette loi et ont proposé 49 amendements qui ont tous été rejetés. Ce qu’ils reprochent principalement à cette loi, c’est qu’elle est porteuse de discriminations, de réduction de libertés et qu’elle ne s’intéresse pas aux moyens nécessaires pour combattre les actes terroristes, comme les recrutements d’agents de la sécurité intérieure, qui eux aussi ont désespérément besoin de plus de moyens, notamment plus de formation aux enquêtes anti-terrorisme. Les députés interrogent notamment la question du financement des organisations terroristes, qui n’a même pas été soulevée alors qu’il a été prouvé que des armes vendues par la France étaient reliées au terrorisme, et que Lafarge, une entreprise française, avait reconnu avoir financé Daech.
Les députés FI ont notamment cité un rapport d’Amnesty International à propos de l’État d’urgence que je vous invite à lire. Il y est traité de l’efficacité réelle de l’État d’urgence et du fait qu’il menace nos droits fondamentaux et qu’il réduit nos libertés. La loi-antiterrorisme qui a été votée mercredi dernier est un vulgaire calquage des moyens extraordinaires, au sens propre du terme, de l’État d’urgence et n’aboutira pas à la réduction totale du terrorisme. Les députés FI l’ont rappelé mercredi soir et tous les 1A le savent : le risque zéro n’existe pas.
Si vous le désirez, vous avez la possibilité d’aller voir ou revoir cette conférence qui a été enregistrée et postée sur le compte YouTube de Ugo Bernalicis, ainsi qu’aller lire le compte-rendu de la séance de l’Assemblée du mercredi 11 octobre. Cette première conférence organisée par l’Arène de l’IEP promet une année riche en débat pour la première rentrée du gouvernement Macron.
Juliette Soulignac