Très heureuse de voir qu’un nouveau film de mon réalisateur préféré était sorti malgré son grand âge (Hayao Miyazaki a 78 ans), je me suis jetée sur AlloCiné pour lire le synopsis. Or je me suis rendue compte de plusieurs choses : d’abord, le Château de Cagliostro sorti le 23 janvier dernier ne passe que dans très peu de salles, ensuite, c’est en réalité le premier long-métrage d’Hayao Miyazaki en tant que réalisateur… Quelle déception, j’ai vraiment cru que Miyazaki se remettait à réaliser des films.
En effet, ce film d’animation japonais a été réalisé en 1979, c’est-à-dire il y a exactement 40 ans et alors même que Miyazaki a pris sa retraite pour la réalisation de long-métrage il y a six ans… Néanmoins, cela ne décourage pas les fans inconditionnels dans mon genre. Le Château de Cagliostro raconte l’histoire d’Edgar de la Cambriole et son ami Jigen qui, en 1968, volent le contenu d’un coffre-fort dans un casino monégasque. Ils se rendent compte qu’il s’agit d’une fausse monnaie assez répandue et décident d’enquêter sur son origine. Cela les mène à la principauté de Cagliostro où un Comte cruel retient la princesse Clarisse dans son château…
Dans son premier long métrage, Miyazaki met déjà en avant ce qui va devenir ses habitudes cinématographiques : les paysages sont pittoresques et bucoliques, tout comme dans la plupart de ses films (Totoro, Le vent se lève, etc). La musique est symphonique. Les machines sont présentes par exemple il y a une horloge sur la tour du château dont la place est centrale pour le déroulement du scénario mais on retrouve aussi la fascination de Miyazaki pour les avions (oui il n’a pas pu s’empêcher d’en faire apparaître un, décidément). De même, il s’inspire des écrivains occidentaux ; Edgar de la Cambriole est en fait le petit-fils d’Arsène Lupin, héros des romans et nouvelles Maurice Leblanc.
Mais le Château de Cagliostro met aussi en place ce qu’on peut appeler les « principes moraux » de Miyazaki. Par exemple, les personnages ne sont pas vraiment stéréotypés, les femmes se prennent en main. Ainsi, dans le film, Magali est une espionne indépendante et qui ne se laisse pas faire, d’une certaine manière, la princesse Clarisse s’affirme de par sa dignité, son savoir-vivre et sa culture face au Comte de Cagliostro qui parait brusque et immoral. On note également une dénonciation de l’injustice et de l’inutilité de la violence, qu’on retrouve dans tous ses films à partir du moment où il y a usage de la violence (Nausicaa de la vallée du vent notamment)
Toutefois, il serait trop facile pour moi de faire uniquement une critique positive du Château de Cagliostro, je dois bien relever quelques points négatifs.
Tout d’abord, j’ai beau cherché mais le Comte est bel et bien méchant, irrécupérable, alors que dans ses autres films Miyazaki crée des « méchants » ambigus, qui ont une part de bonté ou agissent par contrainte ou par peur. Ses personnages ne sont pas aussi manichéens : Dame Eboshi dans Princesse Mononoké, si elle est avide de pouvoir, agit aussi de façon juste envers sa communauté en protégeant les prostituées, entre autres.
Cela nous mène au féminisme : où est-il passé ?! Les princesses passives qui attendent qu’un homme les libère n’existent pas habituellement chez Miyasaki (c’est réservé à Disney). Or, la princesse Clarisse semble patiemment attendre d’être libérée par on ne sait qui. Certes, elle est digne et cultivée mais en termes de princesse on avait plus l’habitude d’une femme combattante et courageuse qui se bat pour une cause juste (Princesse Mononoké), ou sans aller jusque-là, au moins une femme qui cherche à s’émanciper (Kiki la petite sorcière). Peut-être que Miyazaki pensait que la société japonaise de 1979 n’était pas prête à accueillir une héroïne du type princesse Mononoké ?
De plus, on ne perçoit pas la conscience écologique chère aux films de Miyazaki (Nausicaa de la vallée du vent entre autres) ni l’amour pour la beauté de la nature et sa protection exprimées dans Ponyo sur la falaise pour la beauté de la mer, dans Totoro pour la forêt, etc. Au contraire, ici le château en plein milieu de la nature est le repère du mal absolu.
Enfin, si l’histoire est sympathique et agréable, elle n’a pas vraiment de message profond et subtil (hormis qu’il est mal d’emprisonner la princesse et que la liberté c’est important, ce qui est toujours plus subtil que la plupart des dessins animés pour enfant occidentaux). Cependant, c’est toujours une grande expérience que d’aller voir un film de Miyazaki au cinéma, surtout si comme moi vous n’étiez pas né.e.s ou trop petit.e.s quand ses films sont sortis dans les petites salles noires.
Marion Galard