Scénariste, comédien, artiste engagé… on connaît les multiples facettes de Donald Glover. Mais c’est en tant que musicien et sous son pseudonyme plus connu Childish Gambino, que le chanteur dévoile par surprise son troisième album intitulé “3.15.20”.
On ne l’attendait pas, on ne l’attendait plus et pourtant, Donald Glover, de son alias plus connu « Childish Gambino » a su une fois encore nous surprendre. Souvent rapproché de la scène du rap américain, cet artiste ne s’en démarque par moins que par un éclectisme assumé. Pousser la recherche et l’engagement, flirter sans peur avec la limite du sensé, il ne va sans dire que Childish Gambino, depuis le début de sa carrière fait de l’absurde sa marque de fabrique.
Il ne l’avait quasiment pas annoncé ce qui rend l’effet de surprise d’autant plus fort. « 3.15.20 » c’est son quatrième, il porte tout simplement le nom de sa date de sortie. Enfin, plutôt une date de « leak » où les plus furtifs d’entre nous avaient pu retrouver les 12 premières chansons de l’album sur le site officiel de Donald Glover avant qu’elles ne soient retirées. La date finale est bien le 22 mars. Cette simplicité dans le titre en dit long sur un artiste qui, depuis le début de sa carrière, ne s’embarrasse pas avec les élucubrations souvent inhérente au « showbizz » et à l’orbite musicale.
Après une première écoute, on reste totalement déboussolé. L’apparition surprise d’Ariana Grande dans le titre « Time » et de l’iconique 21Savage sur « 12.38 », les touches de Gospel qui s’entremêlent avec l’électro, les vocalises de Childish Gambino lui-même… Cet album est une illustration parfaite de la complexité de son identité, qui n’a jamais eu peur d’aller creuser plus profond dans l’insolite et le décalé pour se dégager une empreinte musicale inimitable.
Un total de 13 sons qui dure quasiment une heure et qui confirme la visée expérimentale de la carrière de Childish Gambino. C’est cette même visée expérimentale et la présence d’un humour toujours fin et pourtant cynique qui m’ont séduite chez cet artiste, et ce depuis la première écoute. Toujours est-il qu’il est important de vous préciser, pour ceux qui ne s’y seraient jamais confronté, que l’univers de ce fameux Donald Glover c’est surtout de l’absurde. Rien ne sert de se casser la tête à chercher un sens profond à son travail, à analyser chaque parole comme s’il s’agissait d’en éclaircir le sens. Childish Gambino, lorsqu’il veut faire passer un message, il le fait clairement, il nous l’a déjà montré sans réserve avec « This is America », pour ne citer qu’elle.
« 3.15.20 » c’est un album qui se vit, qui s’écoute sans faim et sans fin parce qu’on le redécouvre à chaque fois. On peut aimer ou non, il n’empêche que le projet apparaît comme une réelle tentative d’émancipation des codes musicaux contemporains. Les transitions sont inédites, déconnectées des morceaux et pourtant totalement intégrées à la trame musicale du projet. De même, un mélange de genre comme celui-ci brise tous les codes, Childish Gambino, comme je l’ai dit précédemment, on a tenté plusieurs fois de l’affilier à un genre défini, mais la vérité c’est qu’on ne peut le ranger dans aucune case. Evidemment, c’est une voix de fan inconditionnelle qui vous présente cette sortie aujourd’hui. Mais il recèle de tant de rebondissements, de styles différents que je n’ai eu aucun mal à me laisser convaincre une fois encore. Petite mention spéciale d’ailleurs pour le morceau « Feels like summer », renommé « 42.26 » dans cet album, une brise de douceur sortie en septembre 2018 et qu’on a toujours plaisir à retrouver.
Un seul bémol qui pourrait en déranger quelques-un(e)s, outre une recherche d’esthétique musicale plus que de contenus, certains passages, certaines transitions ou montées en puissances peuvent être un peu agressives, ou du moins légèrement oppressante. Mais de tels passages sont quasiment toujours contrebalancés par des sons punchy et pop comme « 35.31 » qui repose sur une rythmique simple, des paroles de même calibre et qui pourtant vous fera danser sans aucun doute.
Parce que c’est là toute la magie de Childish Gambino et ce quel que soit l’album que vous choisirez d’écouter. Il peut nous faire passer par 15 états d’esprits différents en un son et même parfois nous perdre au travers d’un sample mais, quoiqu’il arrive, we will always come back for more.
Clémentine Krabz