Après un épilogue 2019-2020 aussi inédit que magnifique, la Ligue des Champions reprend ses droits, ou presque. Dans une atmosphère particulière et face à un virus qui reprend du poil de la bête, des interrogations se posent et les incertitudes sont de mises. L’intérêt de cette C1 peut-il être conditionné par la pandémie ?
Enfin de retour !
L’attente est sur le point de toucher à sa fin. Ce mardi, la Ligue des Champions, plus prestigieuse des compétitions européennes, reprend enfin du service. Après une édition 2020-2021 qui restera à coup sûr dans l’histoire, aussi bien à cause de son déroulement plus qu’exceptionnel que par le scenario de sa phase finale – pas avare de surprises et rebondissements – les meilleurs clubs du vieux continent sont de retour pour sublimer nos soirées de milieu de semaine, pour notre plus grand plaisir.
Historique. C’est certainement le meilleur qualificatif que l’on pourrait attribuer à cette édition 2019-2020 de la Ligue des Champions. Elle le fut sans conteste et en tout point de vue. Après avoir été stoppée dans son élan par un participant non conviée à la fête à la mi-mars, la C1 s’est vu obligée de reprendre la compétition à l’issue des différents championnats européens. Résultat : des huitièmes de finale qui ont lieu en août, et une phase finale se déroulant dans un seul et unique stade – El Estadio de la Lúz de Lisbonne – sur une période de 12 jours seulement (du 12 au 23 août). Exit les matchs aller-retour, les rencontres de ce “final 8” se déroulent en un match sec. Les rencontres s’enchainent et, dans ce format qui nous rappelle vivement ces doux mois de juillet d’années paires, le relâchement n’est pas permis. Cette Ligue des Champions rafistolée aurait pu, comme pour conclure une année maudite en tout point, nous proposer un finish raté. Mais finalement, contrairement aux craintes que ce contexte de crise et la possible fatigue des joueurs pouvaient susciter, ce “Final 8” fut passionnant. De l’épopée improbable de Lyon au naufrage Barcelonais, en passant par le parcours historique du PSG et la présence des petits nouveaux de Bergame et Leipzig, les souvenirs de cette édition 2019-2020 se comptent en nombre. Après cet été qui – dans une période ou le virus se faisait moins présent – nous aura permis de se retrouver dans des bars, pour vivre ces belles soirées estivales entre amis, en famille, au bord de la plage ou devant la piscine, il est maintenant temps de retrouver la normalité. Notre normalité. Ou presque.
Presque car le monde du football, tout comme le reste d’ailleurs, est encore loin d’être revenu à l’état d’avant Covid. Si la Ligue des Champions, qui s’apprête à lancer le coup d’envoi de sa nouvelle saison, va retrouver son format classique – du moins jusqu’à nouvel ordre – elle n’échappera pas aux problèmes auxquels tous les championnats européens font face depuis la reprise. A savoir, des stades (presque) vides, mais surtout des équipes parfois décimées par la propagation du virus au sein de leur effectif. Les résultats des différents matchs se retrouvent donc très souvent conditionnés par l’état sanitaire des effectifs respectifs qui, lorsqu’ils sont gravement touchés, en ressentent largement les conséquences. On pense notamment au PSG qui à la reprise début septembre avait vu bon nombre de ses cadres être infectés (Mbappé, Neymar, Di Maria, etc), ce qui a eu un lourd impact dans leur début de saison plus que laborieux. Plus récemment, en Italie, Piotr Zielinski et Elif Elmas du Napoli, tous deux contaminés, ont empêché leur équipe de se déplacer à Turin pour affronter la Juventus dans le cadre de la 3ème journée de championnat. Les autorités locales ont décrété que les risques que d’autres joueurs soient contaminés étaient trop grands pour laisser l’équipe faire le voyage, ainsi l’équipe de Gennaro Gattuso fut retenue à Naples. Sauf que les règles en vigueur en Série A sont sensiblement différentes et indiquent que tant qu’une équipe dispose de 13 joueurs sains, dont au moins un gardien, elle se doit d’être en état de jouer. Après plusieurs jours de délibération, durant lesquels chaque camp plaidait sa cause – la Juventus réclamant une victoire par forfait après avoir préparé le match à l’Allianz Stadium comme si de rien n’était, et le Napoli espérant un report du match – la sentence est tombée : victoire sur tapis vert 3-0 de la Juventus et perte d’un point au classement pour le Napoli. Des conséquences terribles, oui.
Le risque d’une Ligue sans champions
Ainsi, si les différents championnats européens sont amenés à vivre ce genre de situation pour le moins inédite, la plus prestigieuse des compétitions européennes doit se préparer à faire face aux mêmes problèmes. Alors qu’en fin de saison dernière, les joueurs contaminés pouvaient presque se compter sur les doigts d’une main, la donne est désormais bien différente. La plupart des équipes des grands championnats ont désormais recensé au moins un cas de Covid au sein de l’effectif ou du staff technique, et cela ne va qu’en s’aggravant. Les chaudrons qui ont l’habitude d’accueillir avec ferveur et passion ces grands matchs européens vont laisser place à de tristes enceintes démunies de tout supporter ou presque, et ainsi retirer à cette Ligue des Champions cette atmosphère unique, ce je-ne-sais quoi d’électrique qui transcende habituellement les stades. Orpheline de son ambiance si singulière, la C1 pourrait également l’être de ses stars. On l’a vu, le Covid peut atteindre tout le monde, et même s’il n’est présent que temporairement dans les organismes de chacun, il peut priver des chocs européens les stars qui font l’essence même de cette compétition si particulière. Et justement, alors même que la compétition n’a pas encore débuté, l’un des matchs les plus attendus par la communauté foot pourrait déjà être amputée d’un de ses acteurs, et non des moindres : Cristiano Ronaldo. Testé positif au Covid la semaine dernière, le Portugais pourrait manquer le sommet du groupe G contre le FC Barcelone de Leo Messi. Les deux meilleurs joueurs du monde n’ont plus croisé le fer depuis le départ de CR7 à la Juve à l’été 2018, et voir leurs équipes respectives tomber dans le même groupe n’a échappé à personne. Oui mais voilà, deux ans et cinq mois après le dernier affrontement entre les deux “GOAT” de la planète football, il se pourrait que les retrouvailles n’aient pas lieu, au plus grand désarroi de tous les fans. La faute à ce foutu virus, une fois de plus.
Si pour l’instant il n’y a pas de quoi s’alarmer, le nombre de cas positifs dans chaque équipe étant pour la plupart des effectifs peu conséquent, la tendance n’est pas à l’optimisme. Non pas concernant la tenue des matchs, qui devraient avoir lieu quoi qu’il advienne, mais plutôt pour leur intérêt. Imaginez un Bayern – Atlético Madrid (affiche principale du groupe A) sans ses Lewandowski, Suárez, Davies, Felix, Gnabry ou Oblak. Ce n’est plus le même match. Et même si cela reste un Bayern – Atlético en phase de groupe de Ligue des Champions, son intérêt, de fait, sera sensiblement moindre sans ses stars. Alors, bien sûr, nous n’en sommes pas là. Mais le virus se propage très vite, et si Ronaldo, pour reprendre son exemple, est à l’heure actuelle le seul joueur “notable” contaminé du côté de Turin – le jeune Weston McKennie l’est également et il ne faudrait pas qu’il le refile à tous ses copains. Il en est de même pour chaque effectif de cette magnifique C1.
La Ligue des Champions est enfin de retour, et même si l’épilogue de la saison précédente est encore bien frais dans nos mémoires, elle nous avait manqué et ses stars aussi. Alors gare au virus messieurs. Après avoir retrouvé une certaine forme de normalité, il serait en effet dommage que les sommets annoncés cette saison ne virent aux rencontres de Youth League. La caricature est lourde, mais l’idée est là. La Ligue des Champions est le théâtre des rêves de ce sport. Elle est le lieu de tous les fantasmes, mais aussi des plus grandes déceptions. Elle est la place où les meilleurs joueurs du monde s’expriment le mieux, là où les plus grands de ce sport ont construit leur légende, et l’occasion pour les futures stars de se dévoiler au monde entier. Alors espérons que la pandémie ne nous retirera pas nos artistes, ou du moins pas tous, aussi bien pour maintenir une certaine équité entre les effectifs des différentes équipes que pour notre plaisir personnel, celui de les regarder.
Adrien Nerozzi-Banfi