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Initiative Zero Euro: “Les frais de concours sont de véritables barrières”

Que ce soit à l’entrée de l’IEP, ou dans les amphis, les tracts pour l’initiative Zéro Euro se multiplient. En ce jour de rentrée, Rémi, FIFA en 5A et vice-président étudiant délégué de l’Université de Lille, Arnaud, FIFB en 4A  et Théophile, FIFB, en pleine préparation pour la troisième année en Angleterre, répondent aux questions de Manu sur l’initiative Zéro Euro IEP. 

La Manufacture: Comment s’est faite l’initiative Zéro Euro?

Rémi : C’est quelque chose qu’on porte depuis janvier 2022 avec Alter Eco. Il est clair qu’il faut une ouverture sociale. Pour s’inscrire pour le concours, c’est 50€ pour un boursier. 50€ c’est pas rien quand on vit à flux tendu on ne peut pas se permettre de payer cette somme ! D’autant plus qu’on parle d’un concours à 10% réussite… Y’a donc aussi un côté très symbolique. On peut leur dire que c’est gratuit d’essayer !

Théophile : “Ça a pris plusieurs mois pour qu’on réfléchisse à la manière de faire. Aujourd’hui  opérationnellement, ce sont les directeurs des 7 IEP qui décident des montants frais de concours. C’est donc à eux de s’accorder pour cette gratuité aux boursiers. On ne peut pas, en tant que liste à Lille, faire pression.

Arnaud:Donc la question est de savoir comment faire pression pour qu’ils acceptent. On n’est pas un syndicat national. Pendant plusieurs mois, donc, on a réussi à contacter les étudiants des autres IEP. De là, on a fait une tribune sur Médiapart, pour une représentation de tous les IEP.

La Manufacture: Quel est l’objectif ?

Arnaud: “Avoir un maximum d’étudiants de tous les IEP qui signent la tribune pour faire pression sur les directions dans l’ensemble. On est dans une perspective, peut-être, de créer des groupes d’action dans certains IEP où ce sera plus difficile de faire plier les directeurs.

Tous, nous l’accordent: “C’est pas juste une tribune ! C’est créer un réseau étudiant qui vise à faire une ouverture sociale un peu partout. Ce n’est qu’une étape, ensuite on déroulera une série de propositions pour améliorer les choses.

La Manufacture: Cette cause vous a-t-elle touchée parce que vous-mêmes êtes boursiers ?

Théophile:Nous ne sommes pas boursiers mais ça ne nous empêche pas d’avoir de l’empathie pour ceux qui, souvent, n’osent pas prendre la parole. C’est une démarche d’intérêt général.

Arnaud: “Je viens des Ardennes. Là-bas, socialement, c’est différent de Sciences Po et je connais des gens qui auraient pu être boursiers et ne pas avoir les moyens de passer le concours.”

Rémi : “Il y a beaucoup moins de boursiers à SPL qu’à la fac. Les chiffres nous montrent qu’il y a encore des progrès à faire. Pour les boursiers zéro bis, les 50€ de frais d’inscription au concours représentent moins pour leur famille que pour les boursiers échelon 5 ou 6. Si on veut attirer ces échelons plus élevés à Sciences Po, supprimer les 50€ s’avère nécessaire.

La Manufacture: Pourquoi avoir pris part à cette mobilisation ?

Rémi: “ Ce n’est pas une revendication sectorielle parce que, en tant qu’étudiant à Sciences Po, ça nous concerne plus. C’est une démarche d’intérêt général. On pense que dans la société dans laquelle nous consommons nos écoles, il y a quelque chose à changer. Comme l’a très bien dit Arnaud, ça se base sur des valeurs, une vision…Un enseignement supérieur ouvert et accessible à tous !

La Manufacture: Y a-t-il eu des évolutions avant cette initiative ?

Arnaud: “Avant l’inscription était en effet à 60€, mais on avait déjà travaillé avec Pierre Mathiot sur la question. L’an dernier, c’était une opportunité ! SPL était à la présidence du réseau des 7 IEP, donc le directeur pouvait organiser les réunions. Avec notre soutien, il a pu baisser de 60 à 50€. C’est une avancée, mais encore insuffisante.”

Rémi: “ L’année dernière, les frais d’inscription pour les boursiers sont passés de 60 à 50€. C’est un premier pas mais ce n’est pas suffisant. C’est à nous de faire changer ça.”

Théophile: “C’est notre premier pas, et ça nous donne de l’espoir !

Ces sciences-pistes réfléchissent déjà aux autres étapes. 

On va réunir les signataires de la tribune, donner leur ressenti, pour avoir un échange et, pourquoi pas, développer les groupes d’action dans les autres IEP.”, pense Arnaud. L’idée lui a tout de suite plu. 

Je suis étudiant tuteur PEI, c’est un élément qui est une barrière. Quand on nous dit en tant que tuteur: “On s’est préparé mais on n’est pas sûrs de le passer à la fin parce qu’on n’est pas en mesure de payer les frais,” retirer un élément de barrière ça serait déjà ça.”

Théophile:La démocratisation de l’IEP, c’est vraiment quelque chose qui est dans notre ADN ( à Alter Eco). L’IEP est un lieu de reproduction sociale. Ça fait sens, pour nous, d’éclater ses barrières. On veut qu’ils se sentent libres d’essayer. .C’est un tout, juste une première pierre et on ne va pas s’arrêter là !

La Manufacture: Avez-vous parlé de cette question de la gratuité avec Pierre Mathiot ? 

Rémi: “ Oui, ça fait un moment qu’on travaille sur ça avec lui et j’ai l’impression qu’il est d’accord avec nous. C’est une aide pour nous permettre d’essayer de faire plier les autres directeurs.

Zero Euro lance donc un appel à la mobilisation et à des témoignages pour faire entendre la voix de tous les IEP. Aujourd’hui, c’est l’optimisme qui règne pour ces trois sciencespistes.

 “ Les étudiants ont le pouvoir de faire changer les choses quand ils se rassemblent, il faut juste qu’ils s’en rendent compte. On peut dialoguer, se mobiliser… et aussi être force de proposition. Seul, on ne peut pas faire grand-chose (…) C’est pour ça que cette initiative a vraiment vocation à être collective.”

Maintenant, c’est l’attente. D’autres étudiants utiliseront-ils “ce levier de mobilisation” ? En tout cas, un pied a bien bloqué cette porte. Et comme ils l’ont confié à Manu, “Reste plus qu’à l’ouvrir complétement ! ” 

Note: Pour les étudiants interviewés, tous ne viennent pas d’Alter Eco. L’initiative a bien été proposée, à l’origine, par Alter Eco, mais l’initiative Zero Euro a pour ambition de s’élargir à tous les étudiants des IEP.

Marie-Sarah Kaci,

Nadia Hebbar,

rédactrices en chef de la Manufacture