Des expérimentations de The Smile et Memorials au nouvel album des Pixies, voici une sélection des sorties du mois d’octobre, avec, ici et là, des voix que l’on est content de retrouver !
Memorials – Memorial Waterslides
Label : Fire
Après la réalisation de musiques de films et leur travail au Centre Pompidou, Memorials, duo de musiciens touche-à-tout, présente un premier album aux ambiances éthérées. La contrainte du nombre est évincée par un entremêlement instrumental qui dote leur musique d’une densité orchestrale.
Les chuintements de bandes magnétiques subtilement manipulées servent autant aux expérimentations bruitistes de “Memorial Waterslide II“ qu’à l’hétéroclite “Book Stall“. Le dernier quart de l’album explore les terres de l’ambient : “Horse Head Pencil“ semble nous replonger en plein Music For Airports de Brian Eno ; l’album s’achève en accalmie, sur de superbes chœurs.
The Smile – Cutouts
Label : XL
Thom Yorke et Johny Greenwood de Radiohead créent The Smile en 2020, y invitent Tom Skinner de Sons of Kemet et font de ce projet un jardin secret d’expérimentations.
Les trébuchements rythmiques de Skinner et le délire microtonal de Greenwood sont évocateurs des recompositions spatiales continues opérées dans les excellents clips de “Foreign Spies“ et “Eyes and Mouth“, une expérience onirique du vide et de l’instabilité portée par les divagations de Thom Yorke « Emptiness it has many forms, the only thing is to listen ». Une réussite.
KO KO MO – Striped
Label : PIAS
Le duo nantais perpétue le son puissant de son album précédent Need Some Mo’ combinant les riffs écorchés par la fuzz de Warren, dont la voix a conservé son tranchant caractéristique, et les kicks telluriques assénés par K20.
KO KO MO est la synthèse efficace entre des références habiles à un âge d’or (le sitar de “The Wise“ aurait probablement fait sourire Brian Jones) et une modernité assumée dans des titres plus électroniques comme “Don’t Let Me Go“ ou dansants comme “Double Vision“ (pas si loin des Black Keys).
Pixies – The Night the Zombies Came
Label : BMG
Celui qui, avec cet album, découvre les Pixies ne sera probablement pas déçu. L’adepte, quant à lui, pourra sonder ses écoutes en vain, il n’y trouvera pas enfouie, la perfection sonore des premières années.
Il faut savoir simuler son innocence et reconnaitre au groupe une évolution largement satisfaisante. L’écoute de The Night the Zombies Came avec une oreille objective, révèle ainsi de très bonnes compositions : le bondissant “You’re So Impatient“ et l’abrasif “Oyster Beds“, de très bonnes ballades également avec le cynisme sombre de “Chicken“ ou la jovialité de “Kings of the Prairie“.
Libre à chacun de faire de cet album son totem ou un simple marchepied pour une réécoute nostalgique de Doolittle.
Amyl and the Sniffers – Cartoon Darkness
Label : Rough Trade / Beggars
À un débit mitraillant, Amy Taylor (Amyl) hurle une liberté sans ambages. Les invectives cinglantes et les riffs de Declan Martens font du son de ce quatuor australien un signal brut, un aller simple dans la face de son public. L’écoute de “Big Dreams“ et “Bailing On Me“ est toutefois surprenante : Amy Taylor est décidément l’une des voix les plus intéressantes, d’Australie à n’en pas douter, et bientôt de tout le reste.
Si Amy est autant en mesure d’écrire des chansons touchantes que des brûlots émancipateurs, elle possède avant tout le pouvoir de ne pas avoir à choisir entre les deux, le meilleur qui soit.
Mustang – Megaphenix
Label : Vietnam
Jean Felzine, le beau crooner gominé, revient avec sa bande dans cet album à peu près impeccable. Les paroles amères et d’une méchanceté acerbe sont savoureuses et font preuve d’une qualité d’écriture rare. Le chanteur distribue des baffes à Steve Jobs, à la chanson française, règle ses comptes avec rancœur avant de sombrer dans une crainte mystique qui confine à la résignation. Tout cela porté par des instrumentaux décomplexés, guitare en tête d’un power trio efficace.
L’invitation d’Arthur Teboul de Feu! Chatterton dans l’excellent “Aéroport“ parachève cet album.