Les chemises à rayures, le bourdonnement des machines à écrire et des sonneries de téléphone, le tout délimité par la fumée des cigarettes … le journalisme d’investigation a fait rêver plus d’un futur palien, et ce, grâce à nombre d’adaptations cinémas mettant en scène des journalistes comme modèles d’abnégation, révélant des scandales au péril de leur vie. À l’occasion de la sortie de Pentagon Papers, retour sur ces films qui nous ont donné envie d’être journalistes.
Note : La sélection est purement subjective et non exhaustive.
Les hommes du président – Alan J. Pakula, 1976 (Etats-Unis)
Le pitch. L’adaptation du livre éponyme de Bob Woodward et Carl Bernstein (lauréats du prix Pulitzer en 1973), les deux journalistes du Washington Post qui ont enquêté sur le scandale du Watergate en 1972. Le film montre comment, partant du constat que les cambrioleurs de l’immeuble avaient sur eux un équipement pour placer des micros, Woodward et Bernstein remontent progressivement, par des recueils de témoignages, jusqu’aux plus hautes sphères de l’Etat (à savoir le président Nixon), un parcours qui n’est pas sans obstacles.
Pourquoi le regarder ? Les hommes du président est l’incontournable du genre. La mise en scène, bien que très classique, est très efficace grâce à un exposé clair et une nervosité qui va crescendo. Le film est également musclé par la complicité de Dustin Hoffman et Robert Redford. À noter : le film a été récompensé par quatre Oscars (sur huit nominations).
Spotlight – Tom McCarthy, 2015 (Etats-Unis)
Le pitch. On a là le même type d’environnement que chez Pakula, mais sur un sujet plus actuel. Spotlight est le nom de l’équipe de journalistes (prix Pulitzer 2003) du Boston Globe dont l’enquête mènera à la révélation du scandale des prêtres pédophiles couverts par l’Eglise catholique, qui, en plus d’être au courant, a étouffé l’affaire par la corruption et les menaces.
Pourquoi le regarder ? On part ici sur une intrigue très similaire : le progressif dévoilement d’un scandale et un parcours semé d’embûches. Spotlight se distingue cependant par une thématique à laquelle on peut plus facilement s’identifier. Le Watergate, aussi titanesque soit-il, était un « énième » scandale d’ordre politique, une sphère qui peut parfois sembler éloignée du quotidien et qui inspire naturellement la méfiance des journalistes, contrairement à l’Eglise. Ici, on a affaire à une communauté très marquée par la religion catholique, à des journalistes qui pour la plupart avaient reçu une éducation religieuse et qui voient leurs croyances les plus profondes remises en question. Et c’est là que réside sa force : Spotlight est un film qui prend aux tripes. (Ah, au fait, il a aussi eu 2 oscars)
La saga Millénium – Niels Arden Oplev, 2009, puis Daniel Alfredson en 2010 (Suède, Danemark)
J’avoue, je triche un peu, j’ai pris la trilogie entière … mais si je vous avais seulement mis le premier film, vous auriez seulement pensé aux fleurs séchées et aux passages du Lévitique. Alors que si l’on s’écarte de l’affaire Harriet Vanger et qu’on considère la trilogie dans sa globalité, on se souvient que Millénium, c’est quand même le nom d’une revue, et que l’un des deux personnages principaux est … un journaliste d’investigation.
Le pitch. Car Les hommes qui n’aimaient pas les femmes, c’est aussi l’histoire d’un journaliste qui découvre une affaire impliquant un magnat de la finance, et qui, contrairement aux deux films que je viens de vous présenter, (au début, du moins) ne parvient pas à dénoncer le scandale.
Et si l’y a eu deux volets supplémentaires, c’est pour une raison : Millénium transpose les mêmes personnages et la même rédaction sur des affaires différentes (et de plus en plus sombres) : un réseau de prostitution venu d’Europe de l’Est, puis les activités controversées de la Sapö, une fraction secrète des services de renseignement suédois.
Pourquoi le regarder ? Déjà, son réalisme : à la différence de Spotlight et des Hommes du président, les contraintes déontologiques et de sources, ainsi que le fonctionnement global d’une rédaction et le processus d’enquête prennent une place plus importante et rendent compte du travail réel d’un journaliste d’investigation, sans pour autant affaiblir le rythme du film. Peut-être retrouve-t-on là le style scandinave : une histoire sombre, haletante, et cruellement vraisemblable – en dépit du fait qu’il s’agisse ici d’une pure fiction.
Mentions honorables
Zodiac (David Fincher, 2007) : À l’été 1969, la rédaction du San Fransisco Chronicle reçoit des lettres du tueur du Zodiaque, contenant des séries de cryptogrammes. Le dessinateur Robert Graysmith, malgré le scepticisme de ses collègues, va tenter de les déchiffrer …
Veronica Guerin (Joel Schumacher, 2003) : Biopic sur la journaliste irlandaise Veronica Guerin, qui enquêta sur le trafic de drogue à Dublin dans les années 1990, avant son assassinat en 1996. Érigée au rang d’héroïne nationale, elle a reçu le titre de « héros de la liberté de la presse », décerné par l’International Press Institute en 2000.
L’enquête (Vincent Garenq, 2015) : Film français sur l’affaire Clearstream (société bancaire), révélée par Denis Robert, un journaliste de Libération en 2000.
Enjoy,
Joséphine Coadou