A Tourcoing, une semaine avant les élections municipales, le cœur est à la fête. Dimanche 8 mars, devant la mairie, les quelques partis politiques présents ont du mal à faire campagne. En fait, c’est le week-end Géant ; fanfares, parades et fête foraine sont au programme. Mais quand on aborde le thème des municipales, les Tourquennois.e.s sont plus mal-à-l’aise. La conversation tourne vite autour de la lassitude vis-à-vis des politiques et de Gérald Darmanin, dans une ville où un peu plus de la moitié des électeurs se sont abstenus au second tour des dernières municipales.
Retour sur la campagne électorale
A Tourcoing, seconde ville du département, 8 candidats vont s’affronter pendant le premier tour. Le maire sortant Jean-Marie Vuylsteker (Les Républicains) ne se présente pas à sa propre réélection. Il remplaçait Didier Droart, décédé en cours de mandat, qui lui-même remplaçait Gérald Darmanin, nommé ministre des comptes publics en 2017. Gérald Darmanin se présente, sous l’étiquette plus ou moins cachée de La République en Marche. Il se trouve face à une gauche divisée (5 candidats hors-EELV) mais où la France insoumise est arrivée en tête lors de l’élection présidentielle. Le Rassemblement national y est de plus en plus puissant.
« J’ai 70 ans et pour la première fois, je ne vais pas voter »
Mais parler de politique n’est pas toujours aisé. Tous les étudiants et lycéens que nous avons rencontrés ont affirmé qu’ils n’iraient pas voter dimanche. C’est le cas par exemple d’Océane, en terminale au lycée : « Franchement, les municipales, ça ne m’intéresse pas » et de Teddy, étudiant à Polytech Lille : « Ce n’est pas mon domaine, je ne comprends pas vraiment la politique donc je ne vais pas aller voter ».
Un peu plus loin, nous rencontrons Jocelyne, retraitée, qui aborde tout de suite la question Gérald Darmanin. Elle regrette qu’il ait préféré partir à Paris plutôt que de rester maire de Tourcoing : «Je suis très déçue qu’il nous délaisse comme ça ». Elle dénonce aussi les nombreux problèmes que rencontrent sa ville, dans laquelle elle habite depuis toujours : « Les commerces partent, on ne se sent plus en sécurité ici. Maintenant, Roubaix est mieux que Tourcoing ». Jocelyne ne votera sûrement pas aux élections de dimanche : « Je n’ai plus d’espoir, je n’attends plus grand-chose de mon maire ; vous vous rendez compte, j’ai 70 ans, et pour la première fois, je ne vais pas voter ». Pour elle, Gérald Darmanin peut gagner car c’est le seul qui connait bien Tourcoing, même si selon Jocelyne « Il quitte le Gouvernement au moment où Macron est de plus en plus contesté, il se protège un peu quelque part ».
« Darmanin est parti par opportunité pour sa carrière, il revient aussi par opportunité »
Devant l’hôtel de ville, alors que les fanfares belges jouent les tubes des années 80, Cécile est certaine d’aller voter. Fonctionnaire aux impôts depuis peu, la priorité selon elle est l’emploi : « Dans le centre-ville, tous les commerces ferment, c’est vraiment triste, j’aimerais que mon maire incite les entreprises à s’installer à Tourcoing. ». Un autre enjeu important est l’écologie et l’environnement. Selon elle, Darmanin est surtout un opportuniste : « Darmanin est parti par opportunité pour sa carrière, il revient aussi par opportunité ».
Notre parcours se termine devant le métro Tourcoing centre. Nous croisons alors Isabelle, chargée de communication, et Jean-Baptiste, chef d’entreprise. En couple et parents, ils habitent à Tourcoing depuis 6 ans. Pour Isabelle, le fait que Gérald Darmanin soit ministre et maire est tout à fait envisageable : « Je préfère un maire efficace qui est là à mi-temps plutôt qu’un maire inefficace qui est toute la semaine à Tourcoing ». Pour eux, il n’y a pas de graves problèmes à Tourcoing : « On a vu une bonne évolution de la ville depuis qu’on y habite ; par exemple, il y a de plus en plus de caméras de vidéosurveillances ce qui fait qu’il y a moins de problèmes de sécurité ». Sa femme précise : « Surtout, il y a un véritable retour à l’emploi ». Ils vont se rendre aux urnes dimanche.
En tout cas, lorsque la conversation ne tourne pas autour de Darmanin et que les Tourquennois.e.s s’intéressent à la politique, les principaux problèmes à Tourcoing sont souvent pour eux le manque de dynamisme du centre-ville, le chômage et les politiques écologiques. Mais la vraie question pour beaucoup d’habitants reste la réélection, ou la non-réélection de Gérald Darmanin. Si certains sont déçus que leur ancien maire ait préféré Paris à leur ville, d’autres sont fiers qu’il soit devenu ministre et revienne à Tourcoing.
Marion Galard