Eugénie est en deuxième année à Sciences Po Lille. L’été dernier, elle est partie à Dahè, au Bénin, dans le cadre d’un stage au sein de l’ONG Eduk&Action. Une expérience formidable, car une fois devenue membre de l’ONG, elle ne l’a jamais quitté. En septembre dernier, elle a monté l’association Eduk&Action France, la branche française de l’ONG béninoise. Elle nous raconte son engagement dans cet entretien.
Est-ce que tu peux te présenter, toi et ton projet professionnel ?
Je m’appelle Eugénie, et je suis en deuxième année à Sciences Po Lille. J’aimerais entrer en master Paix-action Humanitaire-Développement (PHD) après ma troisième année, et plus tard travailler dans des organisations internationales ou des ONG autour des enjeux de crises humanitaires, des droits de l’homme et de l’enfant. C’est dans ce cadre-là que je suis partie en stage avec l’ONG Eduk&Action au Bénin, pendant l’été 2020. J’ai connu l’association par le biais d’une offre de stage sur Facebook. Après m’être renseignée auprès d’anciens bénévoles, j’ai pris contact avec les responsables sur place pour définir mes missions et mon engagement. Le contact étant très bien passé avec l’équipe sur place, ça m’a convaincu de partir au Bénin.
Pourrais-tu nous parler de l’ONG, ses engagements et ses missions ?
Eduk&Action a été créée en 2013 au Bénin (Afrique de l’Ouest ndlr). Elle siège à Cotonou, la capitale économique du pays, mais elle agit dans tout le Bénin, auprès des populations les plus démunies, et surtout les enfants orphelins ou placés en centres sociaux.
Eduk&Action travaille en partenariat avec des hôpitaux, des orphelinats, des centres sociaux, et bientôt avec des crèches et des garderies. L’ONG agit aussi auprès des femmes seules, que ce soit des femmes seules ou des jeunes filles parfois touchées par les mariages ou grossesses précoces. L’association accueille beaucoup de volontaires étrangers, de France et de Suisse principalement.
Quelles étaient tes missions pendant ton stage ?
J’ai fait mon stage dans l’orphelinat Bénin-Vignon, un des orphelinats partenaires de l’ONG, situé à Dahè. Cela m’a permis de vivre avec les enfants, les découvrir et les écouter. J’avais pour mission de donner des cours de français et de maths tous les matins aux enfants en primaire, car bien qu’ils étaient en vacances scolaires, il devaient réviser pour leurs examens, reportés à cause du Covid. Pour les collégiens et les lycéens, je faisais du soutien scolaire pour entretenir leur niveau en mathématiques et en français notamment. Bien que l’école se fasse en français, ce n’est pas la langue maternelle de la plupart des enfants, qui le parlent couramment vers l’âge de 7 ou 8 ans à l’orphelinat. A Dahè, la population parlent le sarouhè, un des dialectes béninois. Les cours se faisaient donc le matin. L’après-midi était dédiée aux loisirs, donc on faisait plus des jeux éducatifs et sportifs, des activités artistiques, etc … J’ai aussi participé à la gestion des projets de l’ONG. Concrètement, cela signifie observer les besoins sur place, créer des devis, faire des calculs de financement, … On a notamment monté un projet de bibliothèque près de l’orphelinat, et un programme de parrainage, dont je parlerais plus tard.
Quelle importance a aujourd’hui Eduk&Action dans le contexte actuel du Bénin ?
Aujourd’hui, la société béninoise fait face à de nombreuses problématiques concernant la scolarisation des enfants. Ils sont nombreux à ne pas encore avoir accès à l’école, parce qu’ils doivent travailler très tôt, ou qu’ils habitent dans des milieux très ruraux où l’accès géographique y est limité, par exemple lors de la saison des pluies, … Les jeunes filles sont d’ailleurs plus touchées par ce problème d’accès à l’école, car elles peuvent être notamment exposées à des mariages ou grossesses précoces les éloignant de la scolarisation.
Mais une des contraintes majeures reste celle du prix de la scolarité, car bien que l’école primaire soit dite gratuite dans la loi, les familles et les orphelinats doivent très souvent payer le matériel scolaire, les sorties pédagogiques, les frais d’examens, etc…. ce qui n’est pas possible pour tout le monde. Eduk&Action est donc présente pour valoriser l’enseignement dans ses différentes structures, mais aussi véhiculer des valeurs de partage, de vivre-ensemble et de paix, dans un pays où la démocratie est aujourd’hui mise en danger, comme le montre l’élection présidentielle dernièrement*.
Quel retour as-tu sur ton expérience au Bénin et auprès de l’association ?
C’était une expérience géniale. C’était très intéressant de travailler auprès d’enfants, j’y ai beaucoup appris. Les enfants étaient géniaux, et sur-motivés pour participer aux activités scolaires. Ma mission n’en était que deux fois plus intéressante. On s’est aussi très bien entendu avec l’équipe de Eduk&Action, et c’est encore le cas aujourd’hui. Globalement, le Bénin est un très beau pays, que j’ai apprécié notamment par les rencontres que j’ai pu y faire et la culture de vie sur place.
Car, après ton stage, tu as continué à travailler avec Eduk&Action.
Exactement, j’ai monté l’association Eduk&Action France en septembre 2020. C’est donc une branche de l’ONG béninoise, qui lui vient en soutien, sur le modèle d’une antenne internationale à Eduk&Action. Concrètement, c’est par là que passent désormais les financements pour les projets de l’ONG venant de France ou des pays alentours.
Eduk&Action France, c’est un peu une jonction entre les financements et les projets sur le terrain au Bénin. Donc la partie financière et administrative, et le travail auprès des partenaires financiers se fait plutôt en France, et c’est au Bénin que les projets prennent vie, auprès des populations. Pour ce qui est des décisions et de la mise en œuvre des projets, les équipes béninoises et françaises travaillent ensemble.
Aujourd’hui, nous sommes deux à travailler au bureau de l’antenne française d’Eduk&Action, et nous sommes en fort lien avec tous les anciens bénévoles de l’ONG, comme une sorte de sphère d’aide autour du bureau. Un des projets à venir pour l’association est de monter une ferme agro-pastorale, qui permettrait de former les jeunes populations béninoises aux métiers de l’agriculture et de dynamiser économiquement une partie de la nouvelle génération.
Comment venir en aide et soutenir l’association depuis la France ?
Nous avons créé un programme de parrainage, qui constitue un vrai échange entre l’enfant et son parrain/sa marraine, qui pourront communiquer par courrier, Whatsapp ou téléphone. Le parrainage aide aussi l’enfant à continuer sa scolarité, en la finançant. C’est un bon moyen de soulager les orphelinats et les familles et d’assurer un suivi de la scolarité des enfants béninois. Ce programme de parrainage vient tout juste d’être mis en place par l’antenne française, et vous pouvez retrouver toutes les informations sur le site Internet et les réseaux sociaux de Eduk&Action France (voir https://ongeduk-action.com).
Vous pouvez également faire un don à l’association, sur le site Internet, et la récolte de dons servira notamment à la construction d’une bibliothèque à côté de l’orphelinat de Dahè, pour tous les enfants du village. Eduk&Action France accueille aussi des volontaires, que ce soit en stage, en gestion de projet, en marketing associatif ou dans la protection de l’enfance.
N’hésitez à nous retrouver sur Instagram (@ong_eduk_action), Facebook (ONG Eduk&Action) et sur le site de l’ONG : https://www.ongeduk-action.com/.
* NB : Le dimanche 11 avril dernier, les Béninois ont été appelés aux urnes pour élire leur président. Ils ont eu le choix entre le chef de l’Etat sortant Patrice Talon, un ancien homme d’affaires qui a fait fortune dans le coton, et deux autres candidats méconnus, Alassane Soumanou et Corentin Kohoué, proches de la mouvance présidentielle. C’est donc une élection sans véritable enjeu, les candidats étant tous du même bord politique et les potentiels opposants empêchés de se présenter. Les résultats ne sont pas encore tombés, mais le scrutin semble sans suspens.
NB 2 : Toutes les personnes (ou leurs représentant légaux) figurants sur les photos de cet article ont consentis à la prise et la publication de ces photos.
NB 3 : Attention à ne pas confondre le fait de faire un stage conventionnel dans une ONG étrangère et la pratique dites du “volontourisme”, qui se définit par une forme de tourisme conjuguant voyage et engagement volontaire, où des organisations proposent des séjours payants dont le modèle économique repose sur les profits tirés de cet engagement volontaire, bien souvent au détriment de l’intérêt général (définition du site FranceVolontaire.org à retrouver : https://www.france-volontaires.org/avant-le-volontariat/attention-au-volontourisme/).
Propos recueillis par Enora Paniez