Après la parade, “La Manufacture” a arpenté pour vous les principaux lieux d’exposition lillois du dantesque nouveau projet de Lille 3000 : “Eldorado” qui s’étend à toute la métropole. Ce mythe va si bien à la capitale des Flandres, se faisant le mirage d’une contrée légendaire. Du Palais des Beaux Arts au Tri Postal en passant par Saint So’ et la Grand Place, suivez-nous tout au long de ce parcours artistique qui nous a ravi !
Le Palais des Beaux-Arts paré d’or
Notre périple commence au Palais des Beaux arts. La “Golden Room” se mêle à l’exposition permanente du musée créant un mélange entre tradition et modernité.
Au sous-sol, la première salle, entièrement recouverte d’or, nous plonge d’emblée dans une ambiance. Elle est le véritable fil conducteur chromatique entre les diverses oeuvres. Malgré l’appréhension d’un mélange hétéroclyte, l’osmose est finalement présente. La seconde salle nous accueille avec un écran intéractif où se dessine les ombres des passants parmi une pluie de confettis. Cette oeuvre du collectif turque :mentalKLINIK est un bon moyen d’amuser la galerie (sans mauvais jeux de mots). Sans véritable transition, si ce n’est au niveau des couleurs, nous découvrons ensuite le travail de Kendell Geers, un artiste sud-africain qui dénonce la violence sévissant dans son pays. Lorsque l’art devient engagé, nous sommes à la fois saisi par la beauté de l’oeuvre et l’effroi du message transmis. L’oeuvre la plus frappante est une spirale formée de matraques. Bien qu’esthétique, son travail évoque plus douloureusement la réalité d’une violence sans fin. La visite se termine par une dernière salle où sont exposés de magnifiques tissages d’or. Une bonne excuse pour (re)découvrir le Palais des beaux Arts.
Y ALLER :
Lundi : 14h/17h30
Mercredi/dimanche : 10h/17h30
Gratuit tous les dimanches pour les Lillois.
Lille : la nouvelle cité d’or ?
Nous vous laissons le plaisir de découvir par vous mêmes les surprises habillant la Grand’ Place et la Vieille Bourse… Nous nous retrouvons ensuite face à des colosses multicolores. De grands gardiens formant une haie d’honneur jusqu’à la gare Lille Flandres.
Même si vous n’avez pas de train à prendre, n’hésitez pas à flâner sur les quais. Pour ceux qui sont souvent dans la lune, voilà le lieu parfait pour illustrer vos pensées…
En parlant de gare, Saint So’ qui en fut naguère une, s’est elle aussi apprêtée de ses plus beaux apparats. Abonnée aux expositions étranges et décalées, “La Déesse Verte” reste dans cette lignée. Entre curiosités et extravagances, nous fûmes quelques peu perdus face au tableau insolite qui se dressait devant nous. Un étrange bric-à-brac dont le sens nous a totalement échappé. Seules les hamacs sont parvenues à nous bercer dans leur eldorado…
Eldorama, le clou du spectacle
L’exposition “Eldorama” – pour panorama de L’Eldorado – prend pour écrin le Tri Postal en face d’Euralille. Un vaste espace que cette exposition fascinante et on ne peut plus actuelle, utilise à merveilles. C’est de loin notre favorite.
Au fil des salles et des étages, celle-ci décline, de diverses manières de rêver l’Eldorado. Bien loin du rêve simpliste d’un oasis luxuriant où les collines seraient d’or et le plaisir permanent, nous nous retrouvons plongés au coeur d’Eldorados tantôt spirituels tantôt virtuels, de débauches ou bien ceux du rêve du grand départ. Pensée en trois actes, Les mondes rêvés, La Ruée et Un Eldorado sans fin, l’intelligence avec laquelle la scénographie a été réalisé impressionne.
Bien que très instagramable, la salle aux miroirs infinis (voir image à la une), est loin d’être le seul atout de cette immense exposition. Au delà d’une simple évasion dans le rêve, celle-ci montre également à la perfection la rude et âpre réalité, celle des espoirs brisés, des rêves se transformant en cauchemars.
Quand une salle vous invite dans la douceur d’une agence de voyage, étalant pour un prix imbattable, les destinations les plus attractives, la suivante place froidement face au désastre migratoire. Paradoxe criant de notre époque : mettant face à face ceux fuyant leur quotidien et ceux fuyant la misère, la guerre ou la mort. Une image brûlante, surtout quand on sait que cette barque à, des années durant, fait la navette entre Cuba et les Etats-Unis, voyant sombrer nombres de voyageurs.
Cet espoir d’un eldorado, d’une vie meilleure ailleurs est la constante de l’humanité. Un peuple sans cesse mouvant, inlassablement aventureux, pour le meilleur, et pour le pire. A l’image des migrants arrivant aux Etats-Unis des rêves plein la tête et se retrouvant à cirer des chaussures sur les grandes avenues. L’empilement vertigineux de centaines de boîtes par un artiste ghanéens laisse béat : un mur d’espoirs brisés. Un mur séparant arbitrairement ceux ayant réussis et ceux ayant échoués. Au dernier étage, l’exposition propose un épilogue saisissant. Une salle sombre nous invitant à l’ultime voyage, à l’Eldorado final : celui menant à la conquête d’une nouvelle planète…
Verdict : un immanquable
Si les oeuvres laissent assez facilement émerger des interprétations. Nous vous invitons vivement à vous tourner vers l’un des nombreux médiateurs. Tous extrêmement bien informés, sauront étendre votre compréhension du travail des artistes. Un remerciement tout particulier ici à Quentin qui – toujours avec le mot juste – nous a accompagné au fil des salles. Ce compte-rendu ne délivre bien évidemment qu’un court aperçu. Tellement de thématiques sont abordées qu’il serait impossible et mal avisé de toutes les exposer ici. Cette exposition a su tout à la fois nous faire voyager et nous remettre les pieds sur terre. Elle provoque un savant mélange entre émerveillement et introspection.
Y ALLER :
Mercredi/dimanche : 10h/19h
7 € pour les étudiants
Préférez la semaine, les week-end, l’exposition est victime de son succès
Le projet “Eldorado” est l’excuse idéale pour une promenade au cœur de Lille. Un pari réussi qui mérite qu’on s’y attarde : prenez-le temps de vous y plonger !
Matthieu Slisse et Iloé Fétré