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Municipales 2020 : quels enjeux environnementaux pour la MEL ?

Fraîchement débarqué dans la MEL, ou installé depuis quelques années, vous n’avez pas pu le louper : Lille n’est pas vraiment une ville verte. En effet, c’est la deuxième ville la plus polluée de France, après Paris. Sous dotée en espaces de nature, on arrive à 14m2 d’espace vert public par habitant, contre 48m2 pour la moyenne des 50 premières villes de France (en termes d’habitants). 

La ville n’est pas une très bonne élève en matière d’urbanisation écologique, et les nombreuses associations écologistes lilloises ne manquent pas de lui rappeler. C’est le cas de l’association PARC (Protection Aménagement Réappropriation Collective), qui milite notamment pour un projet alternatif de la friche Saint-Sauveur (article à venir). Elle accuse  la politique menée jusqu’à présent par la MEL, qui n’a pas répondu aux enjeux environnementaux de la ville et a même aggravé les problèmes. 

Dans ce contexte d’urgence, entre crise climatique et environnementale, effondrement de la biodiversité ou encore tensions sur les ressources naturelles, … La Manufacture vous propose une synthèse des principaux enjeux environnementaux de la MEL pour arriver à une ville plus verte.

Les sols : un compromis entre préservation et exploitation

Concernant la richesse des sols à préserver de la MEL, les enjeux tournent autour de l’équilibre entre cadre de vie et biodiversité d’une part, et besoins en logements et espaces d’activités économiques d’autre part. Pour cela, la gestion de l’occupation et de la qualité des sols est un enjeu majeur pour le territoire lillois, car la ville connaît déjà des records de densité en terme d’habitation

Pour limiter les besoins d’artificialisation, c’est-à-dire d’exploitation des sols, le renouvellement urbain peut s’appuyer sur la reconquête de friches, polluées ou non : ont recensait 417 hectares de friches en 2009 sur le territoire lillois. Cette reconquête des friches représente donc un enjeu, autant pour des questions sanitaires que pour limiter l’artificialisation et ses conséquences (déplacements, besoin en énergie, pollution et émissions de gaz à effet de serre, cadre de vie, etc.), et peut faire débat, comme pour la friche de Saint-Sauveur. 

Le deuxième pari de la MEL concernant les sols est celui de maîtriser les risques liés à leurs mouvements. En effet, les sols du territoire lillois sont marqués par son histoire, notamment à travers son exploitation. C’est le cas au Sud de Lille, où les habitants sont directement concernés par la présence de catiches (des cavités souterraines creusées pour l’exploitation de la craie). Au bord du bassin minier (Sud-Ouest du territoire), on trouve des risques d’effondrement au niveau des têtes de puits de mines. Pour finir, les sols de plusieurs zones du territoire doivent faire face à un phénomène de retraits-gonflements d’argiles, qui peuvent déstabiliser le bâti après des épisodes de sécheresse, de plus en plus courants dans la région ces dernières années.

 

Les eaux : gestion économe et reconquête de la qualité des cours d’eau 

 

La Deûle polluée

Ce qu’il faut d’abord savoir, c’est que le le territoire lillois est principalement alimenté par deux nappes phréatiques souterraines : celle de la Craie (dans la vallée de la Deûle) et celle du Calcaire Carbonifère (au Nord-Est de la MEL). La première fournit près de 70 % de l’approvisionnement en eau, mais est vulnérable et son état chimique est mauvais à cause d’une pollution par les nitrates, les pesticides et le sélénium. Au contraire, la  deuxième est en bon état chimique mais très bas en quantité, et la MEL a décidé de diminuer les prélèvements sur cette nappe au milieu des années 2000 afin d’inverser la tendance. On se rend donc compte que la gestion économe des eaux est un enjeu important pour le territoire lillois, qui n’est pas autosuffisant.

Le deuxième problème que pose l’eau à Lille, est celui de la pollution des cours d’eau qui traversent la ville. En effet, les principaux cours d’eau (la Marque, la Deûle, la Lys, le canal de Roubaix) sont très dégradés et leur état écologique est jugé mauvais depuis 2012-2013 sur l’ensemble du territoire. En plus de cela, on a recensé plusieurs zones inondables, où se développent fréquemment des zones humides et des inondations par remontée de nappes. Cela concerne environ 5 703 hectares, identifiés en zone humide, soit près de 5,8 % du territoire.

 

Biodiversité et paysage : préserver la richesse naturelle du territoire

 

Le site ornithologique des Cinq Tailles

On ne peut le nier, le territoire lillois subit une très forte artificialisation. Il détient pourtant des milieux écologiques majeurs et une belle diversité d’espèces.  Bien qu’il y ait une faible proportion laissée aux espaces naturels, le territoire abrite un nombre important des espèces régionales : six espèces de plantes régionales sur dix, les deux tiers des oiseaux, un peu moins de la moitié des espèces de mammifères, … Pourtant, seuls 0,63 % des habitats à forts enjeux écologiques sur le territoire sont protégés par une réglementation forte ou par Natura 2000. C’est ce qui rend les enjeux de préservation et de restauration des écosystèmes encore plus importants pour la MEL. 

Les espaces à enjeux majeurs sont pour la plupart le long des cours d’eau : vallée de la Marque (marais de Fretin et de la Marque), de la Deûle et de la Lys. Ce sont des forêts riveraines ou très humides, comme la forêt domaniale de Phalempin, le bois de l’Offlarde ou encore le site ornithologique des Cinq Tailles. De nombreuses analyses montrent d’ailleurs une érosion continue de la biodiversité du territoire. Il y a donc un enjeu de protection de sites naturels (hors de la ville), mais aussi de la biodiversité dite « ordinaire » en milieux urbanisés, qui a un rôle très important pour le cadre de vie, les espaces verts « en ville » couvrant seulement  4,2 % des zones urbaines. 

Autre enjeu de préservation, celui des paysages. Le patrimoine historique et architectural du territoire est exceptionnel, comme on peut le voir avec les quartiers historiques de Lille ou les grandes usines réhabilitées dans les anciens quartiers industriels de la MEL. Il faut donc préserver ces paysages urbains et péri-urbains, et reconquérir certains espaces dégradés. 

 

Air et climat : faire respirer les lillois

La MEL doit faire face à des enjeux forts pour améliorer la qualité de l’air, surtout concernant les émissions résidentielles ou causées par le trafic routier. En effet, à Lille et ses alentours, le nombre de jours où l’air se dégrade est en augmentation depuis 1998, surtout à cause des particules fines qui atteignent des concentrations préoccupantes. Le territoire de la MEL participe à lui tout seul à 15 % aux émissions régionales, ce qui correspond à 36 kg/habitants/an de PM10 (particules en suspension), contre 16 en moyenne régionale. Il faut noter que ces dernières années, la nature des pollutions a changé : d’abord liée à une industrie très présente et active, elle est aujourd’hui surtout due au résidentiel (chauffages au bois non performants) et aux transports routiers. Les conséquences sanitaires de cette pollution sont très fortes sur la métropole : selon une étude Aphekon, une réduction de 40 % de la concentration en PM 2,5 augmenterait de 6 mois l’espérance de vie des personnes de 30 ans vivants à Lille. 

Pour éviter ces conséquences liés au changement climatique, les enjeux pour la MEL concernent donc la prévention de l’augmentation des îlots de chaleur : environ 5 jours/an de canicule supplémentaires sont attendus pour 2080 en métropole lilloise, et les espaces verts en ville, qui tempèrent localement les excès de chaleur, ont ici un rôle important à jouer. La MEL se doit également de prévenir le développement des allergènes et l’augmentation de la pollution : l’ONERC estime que 12 à 45 % des problèmes allergiques (en constante augmentation ces dernières décennies) seraient causés par le pollen, étroitement lié aux conditions climatiques. Les conséquences du changement climatique vont donc continuer à influencer les problèmes d’allergie liés au pollen.

Sans rappeler l’urgence de la situation climatique mondiale, il est évident que Lille a plus que jamais des efforts monumentaux à faire en terme d’aménagements urbains écologiques et gestion des ressources du territoire. Les enjeux écologiques de la MEL seront bien évidemment au cœur des débats pour les municipales de 2020, et nous ne manquerons pas d’intercepter les avis et projets de chaque candidat sur les questions écologiques de Lille. 

Enora Paniez