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Un monde sans hommes: la solution?- la nouvelle série ZéroStérone

On se pressait mercredi après-midi pour venir voir, en avant première, la projection de ZéroStérone. Cette série au format court qui concoure au festival Series Mania se distingue des grosses productions que l’on a l’habitude de voir sur Netflix. Si elle semble au premier abord une série féministe, elle diffuse un message bien plus large qui nous appelle à ne pas tomber dans les solutions trop faciles….

Dans la catégorie des formats courts, la nouvelle série Zérostérone insuffle un certain vent de fraîcheur. L’équipe de la série souligne le caractère ambitieux de cette fiction qui présente presque exclusivement des femmes à l’écran. Ambitieux a été le procédé d’écriture, qui a fait intervenir quatre auteures et dont les actrices ont pu elles-mêmes participer pour déterminer le profil des personnages qu’elles allaient incarner. Ambitieux a été le découpage de cette série qui se compose de 7 épisodes de 15 minutes environ. Ambitieux, enfin, a été le partenariat avec France Télévisons qui va permettre à tous de découvrir cette série gratuitement.

Un monde sans hommes

Et si la solution pour en finir de la domination masculine serait de faire advenir une société essentiellement féminine ? C’est le cadre de départ que se propose d’explorer ZéroStèrone en imaginant un monde, où un virus s’est attaqué aux hommes jusqu’au dernier. Et ce depuis une centaine d’années. Dans ces circonstances, les femmes se sont organisées pour éviter l’extinction humaine en imposant un stricte contrôle de la reproduction. Chaque femme doit alors se faire inséminer à une date précise afin de rationner les dernières réserves de sperme. Cette nouvelle génération qui n’a alors jamais vu d’hommes en dehors des musées, a du mal à imaginer comment ceux-ci se prétendaient autrefois supérieurs. Par de nombreux clins d’œil et traits d’humour, le scénario aborde ainsi un nouveau type d’organisation sociétale où les femmes ont pris pocession de tous les espaces et de toutes les fonctions.
Pourtant, vous l’imaginez bien, une telle hypothèse ne peut rester toute rose: une rencontre va alors tout faire basculer. Lucie, dont c’est aujourd’hui la JAPP (Journée d’Appel et de Préparation à la Procréation), accompagnée de sa sœur Charlie, tombent nez à nez avec une fugitive (incarnée par Marion Seclin) à la recherche du dernier homme. A travers cette nouvelle quête les personnages vont alors questionner leurs certitudes et remettre en question l’ordre auquel elles obéissaient.

 

Une série plus politique que féministe

Si le point de départ de cette histoire semble vouloir étudier les questions de genre et mettre en avant un certain féministe, sa signification va bien au-delà en dénonçant de manière plus général le danger des extrêmes. En effet, comme le dit l’actrice Barbara Bolotner, le message général serait plutôt de se méfier des « mauvais gouvernements ». Ce monde féminin étant dirigé d’une main de fer par une dictatrice qui a le projet de tout contrôler et d’éviter à tous prix le retour des hommes, toutes les femmes doivent se conformer à une vision d’Etat qui contrôles tous les aspects de la vie. Cela amène donc le spectateur à s’interroger avant tout sur les normes insidieuses de la société qui nous conduisent à suivre des comportements collectifs. Cette société, bien qu’émasculée, impose ainsi de nombreuses injonctions aux femmes: l’accomplissement personnel de chacune d’entre-elles reste par exemple conditionné à la maternité. Ceux qui refusent cette obligation reproductrice sont alors des « invisibles » qui vivent en marge de la société. Terme qui fait bien sûr écho à de nombreuses catégories bien actuelles qui se trouvent aujourd’hui dans la même situation.

Il s’agit donc de montrer que « les femmes sont aussi humaines que les hommes », selon l’expression de Marion Seclin. A l’image des hommes, elles sont effectivement capables des pires atrocités. Une fois au pouvoir, elle font tout pour le garder.

Série originale française

Le format court de cette série remplit donc bien sa fonction de dystopie qui nous conduit à penser que les solutions radicales aux problèmes sociétaux que nous connaissons se révèlent souvent encore plus désastreux. Si son caractère original et indépendant se remarque à travers la technique peut-être moins efficace que d’autres super productions, il permet d’introduire une dose de réflexion dans une série haletante qui en a tous les codes, et qui sera de plus disponible pour tous gratuitement. Une réplique venue de ce monde futuriste résonne particulièrement dans nos oreilles d’aujourd’hui. En effet, lorsqu’une femme se dit utopiste en souhaitant « une société où chacun puisse vivre de manière égalitaire et où la maternité puisse être un choix », nous comprenons qu’il est plus facile pour nous de tendre ver cette proche utopie que de vouloir à tous prix des solutions plus radicales.

Alban Leduc