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Tourcoing ne perd pas le Nord

Le Tourcoing-Lille Métropole Volley Ball n’a fait qu’une bouchée de Paris, et entrevoit les play-off. Une démonstration de force qui laisse augurer une fin de saison excitante.

 

Le match : une écrasante victoire du TLM

25-22, 25-14, 25-20. La feuille de match a tout dit. Ce dimanche 12 février 2023, à Roubaix, Tourcoing a asphyxié Paris à l’occasion de la 20ème journée de Ligue A de volley. Plus de rythme, plus d’intensité, une solidité et une régularité infaillibles : les hommes de Mauricio Paes ont dominé leurs adversaires de la tête et des épaules.

Tranchant dès le début du match, les Tourquennois prirent rapidement leurs distances avec les Parisiens grâce à deux belles attaques de Renan Buiatti pour mener 4-1. Ils surent conserver cet avantage au score pour remporter le premier set. Moins inspiré, Paris n’était pour autant pas encore hors du coup.

Le calme avant la tempête

Le début du deuxième set laissait même entrevoir une partie disputée avec un score serré dans un premier temps (9-8). Il ne s’agissait que du calme avant la tempête. A partir de là, sur les 35 points suivants, Tourcoing en marqua 26, Paris 9. Porté par la fougue de sa jeunesse avec de jolis sauvetages de Thibault Loubeyre et surtout les services gagnants de Grégory Gempin et Alexandre Strehlau en fin de manche, le TLM expédia ce 2ème set. Dans un contexte particulier -puisque le coach du TLM la saison prochaine sera Dorian Rougeyron, actuel entraîneur de Paris-, Tourcoing dictait le tempo avec furia. Les artilleurs brésiliens Renan Buiatti, auteur de 21 points, et Antony Gonçalves gratifiaient le public du Stab d’attaques incessantes. La mascotte du TLM ne s’y trompa pas et défila sur le terrain entre les deux dernières manches avec le drapeau du Brésil.

 

    A l’image de cette diagonale puissante de Renan Buiatti, les volleyeurs de Tourcoing ont été dominateurs.

 

Le troisième set démarra tambour battant. Les points défilaient comme les coups frappés aux percussions des supporters. Les Parisiens, fébriles et déboussolés, subissaient dans tous les secteurs de jeu. Les blocs, les attaques, les services : Tourcoing récitait sa partition et ce n’est alors pas une surprise de voir nommé meilleur joueur de la rencontre le passeur Jay Blankenau, chef d’orchestre du soir.

Dorian Rougeyron eut beau tenter d’arrêter l’hémorragie en posant un temps mort à 10-2, le mal était fait pour Paris. Le TLM se faisait plaisir et cette rencontre ne s’éternisa pas. Après seulement 73 minutes, les coéquipiers du capitaine Moritz Reichert pouvaient exulter avec lui sur un service parisien manqué. 

 

           Le public, debout, pouvait applaudir la prestation XXL de son équipe après la balle de match.

 

Cette défaite, cinglante, complique la tâche de Paris, bloquée à 5 points de la huitième place, synonyme de play-off, avant de rejouer mercredi un match en retard contre Plessis-Robinson. Le TLM confirme de son côté qu’il faudra sur lui cette saison. 5ème du championnat, Tourcoing a dorénavant un pied en play-off, et est toujours en course pour accrocher une des quatre premières places, synonymes de phases finales débutées à domicile. Enthousiasmant ce soir, il reste encore tout à faire pour les Tourquennois. Mais, avec une telle prestation, ils se donnent le droit de rêver.

Les réactions

 

En marge de cette rencontre, Daryl Bultor, Renan Buiatti, Alexandre Strehlau et Kellian Paes se sont confiés à La Manufacture. Florilège.

 

Le champion olympique du TLM Daryl Bultor connaît un regain de forme, en ce début d’année. Sérieux et appliqué, il veut amener Tourcoing au plus haut en Ligue A.

La Manufacture : Ces derniers matchs, tu sembles moins gêné par tes blessures. Peux-tu nous confirmer cette sensation ?

Daryl Bultor : Oui, pour l’instant mes blessures à l’épaule vont mieux. J’ai juste encore mal au genou, mais, ça, c’est la blessure typique du volleyeur et je l’aurai tant que je jouerai. Mais oui, je suis content de pouvoir jouer sans avoir mal.

L.M. : Ce match était important pour la qualification en play-off. Après l’avoir remporté, avez-vous dorénavant en tête la 4e place ?

D.B. : Oui, bien évidemment c’est sûr que ce serait mieux de finir dans les quatre premières places afin de recevoir davantage à domicile pendant les playoff. Mais on en est pas encore là, on essaie de prendre match après match. Le plus important, c’est d’aller aux play-off et de faire le meilleur résultat possible.

 

Renan Buiatti a accompli un match hors norme (73% de réussite en attaque, 21 points marqués). L’ancien international Brésilien confirme, après sortie, qu’il est une pièce maîtresse dans le jeu du TLM.

La Manufacture : Quel regard portes-tu sur ton parcours depuis ta grave blessure au pied il y a deux ans ?

Renan Buiatti : Les deux dernières années étaient très difficiles, avec beaucoup de souffrance, et c’était compliqué de se remettre dedans. Mais, j’ai démarré la saison à 100%, sans aucune douleur, et c’est vraiment agréable (Rires). C’est comme si j’étais à nouveau jeune. J’ai eu 33 ans en janvier, mais c’est comme si j’en avais 25 ! C’est ma première année en France et j’aime beaucoup jouer ici. C’est un bel endroit pour vivre, les infrastructures qui sont à notre disposition, à Tourcoing ou à Roubaix, sont excellentes. Je suis très heureux d’y jouer. J’aimerais aussi beaucoup rester dans ce pays la saison prochaine. Je ne sais pas encore où je jouerai mais je veux vraiment rester en France. J’apprécie beaucoup ma vie ici.

L.M. : Tu as failli jouer pour Tours en 2020, mais à cause de ta blessure cela ne s’est pas fait. En janvier, vous avez perdu à deux reprises en 5 sets contre Tours. Quel est ton sentiment sur vos deux seules défaites de 2023, pour le moment ?

R.B. : Ils sont premiers du championnat et ont une très bonne équipe. Il y avait un match de championnat et un match de Coupe de France. On a donné le maximum et finalement les deux matchs étaient très serrés 3 sets à 2, 15-13 au cinquième set pour les deux. Nous n’étions qu’à deux points, mais ils l’ont mérité. Ils ont vraiment bien joué et voyons maintenant si on les rencontre en phases finales.(Rires)

 

Pour sa première saison à Tourcoing, Alexandre Strehlau, jeune réceptionneur-attaquant, a été auteur d’une entrée convaincante face à Paris.

La Manufacture :Grégory Gempin et toi avez réalisé une fin de deuxième set époustouflante. Qu’est-ce que cette jeunesse -dont vous faites partie- peut apporter au TLM, pour cette fin de saison ?

Alexandre Strehlau : Il faut apporter notre énergie, même si cela peut être stressant car on ne travaille pas avec des petits joueurs qui débutent en pro : ce sont quand même des volleyeurs qui sont en équipe nationale, des canadiens, des brésiliens. C’est impressionnant: ce sont des joueurs comme Daryl (Bultor) que j’ai l’habitude de voir à la télévision, notamment aux Jeux Olympiques. Le fait de jouer avec eux me met plus de pression. Et, le plus important, c’est d’apporter une énergie, d’apporter un petit truc sinon tu es vite mis sur le côté car le volley, comme tout sport de haut niveau, est un milieu souvent cruel. Je prends du plaisir à enchaîner les feuilles de match en ce moment, et c’est encourageant parce que ça montre que je tape dans l’œil du coach. Cela signifie que j’ai les moyens de performer dans le sport que j’aime. Collectivement, on va voir comment se termine la fin de saison, voir si on enchaîne les performances comme celle de ce soir qui était plutôt rapide.

L.M. : Tu arrives en fin de contrat à la fin de la saison. Souhaites-tu prolonger l’aventure à Tourcoing ?

A.S. : Pour la saison prochaine, j’envisagerai toutes les propositions et le fait de potentiellement rester en fait partie. Je suis très ouvert mais le problème c’est le fait de changer de gymnase à chaque fois à domicile qui complique l’organisation parfois, la rend plus instable. Mis à part ça, étant donné que quasiment tout l’effectif va changer l’année prochaine, on ne peut pas trop se baser sur le fait que tel joueur reste, donc c’est un choix purement individuel. Même au niveau coach, ce ne sera pas le même donc on ne peut se baser rien. Comme ce ne sont pas des contrats de trois ans, beaucoup d’entre nous arrivent en fin de contrat et d’autres avaient seulement signé pour une saison, notamment les Canadiens. On verra qui le club veut garder à tout prix, je pense que pour un joueur comme Moritz (Reichert) cela ne se discute pas. Me concernant je ne sais pas si je veux rester ou non, mais c’est sûr que c’est un club qui m’apporte beaucoup via l’expérience de Mauricio (Paes) et via l’expérience de chaque joueur donc on va voir ce qu’il se passe.

L.M. : Peux-tu nous raconter tes deux services gagnants à 22-12 et 23-12, dans le deuxième set ? 

A.S. : Ça fait plaisir de voir que tu fais quelque chose que tout le monde va aimer, c’est une récompense. Sur les deux services il faut savoir que c’était mes premiers services de la saison et forcément il y avait du stress et de l’appréhension Cela a un peu changé ma manière de servir parce que normalement c’est plus appuyé, alors que là j’ai davantage cherché la précision. Sur les deux premiers services qui ont fait renvoi direct et ace, j’étais même assez surpris. Je partais du principe qu’il y avait une nette différence de niveau en professionnel, même si je suis plutôt à l’aise sur le plan offensif. En tout cas le plus important c’est d’emmener l’équipe au plus haut niveau. Avec cette victoire, on touche les play-off et s’il y a un titre à prendre à la fin de la saison on le prendra, du moins on essaiera.

Kellian Paes a vécu une rencontre particulière car il affrontait l’équipe entraînée par son père, Mauricio Paes. A 20 ans, le passeur de Paris a pris une nouvelle dimension cette saison.

La Manufacture : Qu’est ce qui vous a manqué ce soir pour rivaliser avec Tourcoing ?

K.P. : Il fallait mettre des ingrédients comme l’envie, la rage, un peu d’ego aussi puisqu’on était face à une équipe de Tourcoing qui jouait très bien. Je ne pense pas qu’il y ait des aspects tactiques et techniques à remettre en place si on devait rejouer le match. C’est surtout une question de dynamique et beaucoup d’envie aussi.

L.M. : Le fait de jouer contre l’équipe de ton père a-t-il changé l’approche de ce match ?

K.P. : Non, c’était une préparation classique comme n’importe quel match : on prépare avec Dorian (Rougeyron, son entraîneur) un aspect tactique collectivement. Individuellement, il n’y avait aucune différence particulière, même si évidemment il ne faut pas négliger le côté sentimental qu’on peut avoir en match. Ça ne rentre pas dans les inconnues importantes de l’équation, qui sont plutôt des choses un peu plus factuelles comme le collectif, les aspects tactiques et techniques autour desquels il faut se regrouper. Si je joue contre mon père, ou contre n’importe quel autre entraîneur, je prépare le match de la même façon.

L.M. : Peux-tu nous en dire plus sur Dorian Rougeyron, ton entraîneur actuel qui dirigera Tourcoing l’an prochain ?

K.P. : Comme la plupart des coachs de première division, c’est un très bon coach. J’ai une relation spéciale avec lui car on s’entend plutôt bien donc c’est plus qu’une simple relation de joueur à coach. C’est un bosseur, il est très discipliné et rigoureux. Et, je pense qu’il a tous les ingrédients qu’un coach doit avoir pour mener une équipe à la victoire. Aujourd’hui, il ne maîtrise pas tout à Paris car les conditions ne sont pas réunies mais Dorian est un excellent coach. Je travaille très bien avec lui, et je pense que cela a été le cas pour la plupart des joueurs qui sont passés sous ses ordres.

Mathis Hardouin