Selon un sondage CROP, les jeunes adhèrent plus que ce que l’on pourrait penser à des valeurs conservatrices. Sur 3 976 participants, 40 % des 18-34 ans affirment être d’accord avec l’idée que le père de famille doit commander chez lui. Cette statistique peut sembler étonnante lorsque le féminisme est en pleine floraison, cependant, l’idée que la génération Z soit la génération du progrès, de l’égalité et de la liberté n’est pas tout à fait vraie non plus.
Il faut dire les choses comme elles le sont : c’est à cause du téléphone. En partie évidemment car les crises économiques et pandémies n’ont pas été d’une grande aide non plus. Mais concentrons nous d’abord sur ce qui distingue la génération Z des autres: l’arrivée d’Internet. Il n’y a pas besoin de grands arguments pour affirmer que les réseaux sociaux ainsi qu’Internet en général jouent un rôle important dans la vie des jeunes. Cependant les dernières modes nous donnent un aperçu de la tendance politique de ces derniers, du moins une partie non négligeable (#notallgenZ). La tendance de la vie de “trad wife”, soit “femme traditionnelle” en est un exemple assez flagrant. Il s’agit de prôner la vie de femme au foyer, de mère traditionnelle cuisinière et ménagère et au premier abord on pourrait penser qu’il n’y a aucun mal à être femme au foyer, ce qui est vrai. Cependant, la tendance devient problématique lorsque l’on prend en compte l’omission considérable de la charge de travail ménager d’une femme au foyer. Ces dernières ne passent pas leurs journées à nourrir les poules et gambader dans les champs de fleurs comme le montrent les réseaux sociaux, et bien que le fait que la réalité ne corresponde pas aux images sur les réseaux soit une évidence, la tendance de la “trad wife” renvoie une image faussée de la vie de femme au foyer. De plus, le concept de “trad wife” englobe également tout un assortiment de valeurs prônant la soumission des femmes ainsi que le rejet de plus ou moins toute idée un peu trop libérale dont l’existence de personnes LGBTQ+.
Au niveau de la mode vestimentaire tendance sur les réseaux sociaux, le conservatisme s’y retrouve également car les crop-tops et mini-shorts ne sont plus au goût du jour, ils ont laissé leur place aux clean girls et aux pulls Ralph Lauren. Que ce soit avec la tendance de “clean girl” (tendance qui prône une vie bien rangée, propre et organisée) ou celle des “old money” (style de vie inspiré d’anciennes familles fortunées), si toutes les tendances ont bien un point commun, ce sont les design épurés, les couleurs neutres ou pastels, qui n’attirent pas l’œil, les formes simples, et surtout rien d’original, d’inattendu, d’extravagant, qui sorte de la norme et qui pourrait attirer l’attention. Alors quel est le message envoyé par l’accumulation de toutes ces tendances ? Privilégiez la pudeur, rentrez dans les cases et ne faites pas de vagues, et quoi de plus facile que de commander un peuple lissé et uniforme ?
En ce qui concerne la politique, la génération Z a été servie en ce qui concerne les crises, surtout économiques qui sont des phénomènes connus pour être suivis par une perte de confiance envers les gouvernements politiques. Entre la crise économique de 2008 et ses retombées, la crise migratoire, l’épidémie de Covid-19 et pour couronner le tout, le dérèglement climatique, les raisons pour se désolidariser des gouvernements ne manquent pas. Un sondage du Survey Center on American Life illustre ce manque de confiance envers les leaders politiques dans le cadre de leur étude sur les différences entre la génération Z et les précédentes. On peut y constater que le pourcentage de manque de confiance est identique pour la génération Z et les Millennials mais celui-ci chute drastiquement par-rapport aux trois précédentes générations.

D’autres études observent également une tendance conservatrice plus accrue chez les garçons/hommes que chez les filles qui se tournent davantage vers la gauche et le féminisme depuis le mouvement #MeToo en 2018. L’exposition croissante des jeunes femmes aux thématiques féministes les pousse à partager leurs avis sur la question, ce qui a créé chez des jeunes hommes un sentiment de menace qui par mouvement de contradiction les oriente vers des positions conservatrices.
La génération Z reste en majorité progressiste, mais cette ouverture à la nouveauté n’est pas à prendre pour acquise, surtout par les temps qui courent.
Clémentine Grand-Perrin