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La Revanche d’une Blonde, comédie superficielle ou critique sociale ?

C’est lorsque l’on a trois examens et quelques travaux à rendre la semaine suivante que l’on se retrouve à chercher tous les moyens pour ne pas travailler. Chacun sa technique : la mienne, cette fois-ci, était de regarder, totalement par hasard, un film des années 2000 au titre évocateur – « La Revanche d’une Blonde », ou « Legally Blonde » en version originale.

Au premier abord, cette comédie réalisée par Robert Luketic ne semble pas disposer d’une très grande profondeur. Son synopsis est simple et pourtant étonnant : tout sourit à Elle Woods (Reese Witherspoon), présidente de sa sororité à l’Université de Californie, respectée par ses pairs et naturellement blonde. Lorsque son petit ami la quitte par peur qu’elle ne soit un frein à ses ambitions, elle est décidée à le faire revenir vers elle par tous les moyens. C’est ainsi qu’avec volonté et persévérance, elle se retrouve à intégrer l’université d’Harvard pour y étudier le droit. Malgré des débuts difficiles, elle se découvre un certain talent pour la discipline, et en vient même à assister un de ses professeurs, Callahan (Victor Garber), dans une affaire de meurtre.

Un film stéréotypé ?

Un scénario comme celui-ci peut facilement se prêter à des exagérations ou des stéréotypes, et c’est malheureusement l’apparence que prend le film dès l’ouverture. Certains passages sont maladroits, faisant disparaître l’aspect comique derrière des représentations blessantes voire discriminatoires. Il faut admettre que la réduction d’un homme homosexuel à son apparence et sa personnalité n’est pas vraiment source d’humour, et on peut donc parfois remettre en question le bon goût du réalisateur et des scénaristes. On retrouve surtout cette maladresse dans les portraits des personnages, presque tous totalement stéréotypés : ainsi, le spectateur est tiraillé entre pitié et amusement envers Elle, qui fait tâche et attire les regards dans un milieu universitaire prestigieux comme Harvard ; quant à sa rivale Vivian Kensington (Selma Blair), excessivement méchante, elle renforce le manichéisme apparent du film. Les personnages masculins aussi sont hyperboliques : la superficialité du prétendant d’Elle, Warner Huntington III (Matthew Davis), s’oppose radicalement à la sagesse incarnée par le professeur Callahan.

Des personnages porteurs d’espoir 

Malgré ces points négatifs, il ne faut pas prendre peur et éviter le film complètement, car il est tout de même plus profond qu’il n’en a l’air. En effet, une des forces du long-métrage est qu’il arrive à déconstruire progressivement les stéréotypes mis en place au début. Au cours de l’histoire, chaque personnage évolue et gagne en complexité, dépassant la caractéristique initiale qui semblait les définir. C’est en y regardant de plus près que l’on voit alors le potentiel du film, celui de porter un regard critique sur différents aspects de notre société – le principal étant notamment la place des femmes dans les milieux universitaire et professionnel, par ailleurs sujet d’actualité. Les personnages d’Elle et de Vivian incarnent deux représentations problématiques de la femme en entreprise : une femme tête-en-l’air recrutée par indulgence et réduite à son apparence pour Elle, contre une femme manipulatrice faisant preuve de trop d’ambition pour Vivian. C’est en cassant ces représentations que le film nous en démontre l’absurdité, et souligne que l’on peut effectivement être une femme et réussir, un message porteur d’espoir. Cet espoir, on le retrouve enfin dans les scènes montrant une véritable solidarité féminine, sorte d’ostinato présent de la scène d’ouverture jusqu’au dénouement. Dans le soutien qu’Elle apporte à Brooke Windham (Ali Larter), accusée du meurtre de son époux, on voit bien la confiance qui lie les différentes figures féminines du film. Sans oublier l’extrait où Elle redonne confiance à Paulette Bonafonté (Jennifer Coolidge), autrefois victime d’un mari abusif, mobilisant dans le même temps les clients du salon où elles se trouvent. Cela donne une scène certes un peu tarte dont seules les comédies américaines ont le secret, mais qui est néanmoins optimiste et qui célèbre à la fois diversité et solidarité.

En dépassant sa façade de comédie maladroite, « La Revanche d’une Blonde » porte un regard amusé et critique sur la société, et nous invite, comme le rappelle Elle Woods lors de sa remise de diplôme, à « ne jamais oublier que la première impression n’est pas toujours la bonne ».

Adèle Chevalier

Source de l’image : RGS FILM CLUB – WordPress.com