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Ecologie: “Il faut que l’Etat régule, mais cela se joue avant tout au niveau du consommateur!”. L’interview des Jeunes Républicains

Il y a un mois des milliers de jeunes séchaient les cours pour alerter les gouvernants sur leur inaction en matière climatique. Dans un mois, un certain nombre de dirigeants européens seront renouvelés à l’issue des élections pour le parlement européen. A mi-chemin entre ces deux moments forts, La Manufacture est donc allée interroger des membres de différentes jeunesses politiques pour connaître l’implication de ces grèves climatiques sur les organisations politiques et ce qu’il en ressortira pour les prochaines élections européennes.

Notre cycle d’interviews continue avec les réponses à nos questions sur les grèves climats et l’Europe de Guy Noël Selliere, représentant des Jeunes Républicains du Nord.

C’est quoi les Jeunes Républicains?

Les jeunes LR sont autonomes mais pas indépendants du parti central. Nous pouvons être pensé en deux parties: comme cerveau et bras du parti. Le cerveau puisque les jeunes sont forces de propositions, nous organisons ainsi des débats dont les conclusions sont ensuite remontées au parti. Et nous sommes également le “bras armé” du parti en faisant campagne sur le terrain et notamment sur les réseaux sociaux. Contrairement aux jeunesses socialistes nous sommes avant tout là pour le parti et non dans une totale indépendance.

Quelle est la position des Jeunes Républicains sur la question climatique?

Si le problème a longtemps été laissé de côté dans notre parti, on disait même en interne que l’écologie c’est comme un pastèque, verte à l’extérieure et rouge à l’intérieur, nous nous mobilisons de plus en plus sur cette thématique. D’abord parce qu’elle s’inscrit dans notre projet de conserver la terre, de protéger les territoires. Cependant, si je suis un grand défenseur de la société de consommation je pense que nous pourrons entamer un réel changement lorsque nous aurons trouvé des innovations permettant de pallier aux effets néfastes pour l’environnement. Il faut en effet rappeler que personne ne pollue par plaisir, ce sont toujours des besoins qui n’ont pas encore trouvé de palliatifs. Le problème c’est que nous avons pris beaucoup de retard, de nombreux « cerveaux » français sont partis à l’étranger et à chaque innovation écologique, on se rend compte très vite que ça ne marche pas. Je pense par exemple aux bouteilles fabriquées à partir de matières végétales qui se sont finalement révélées beaucoup plus polluantes que celles en plastiques. A la place de politiques générales punitives et hâtives, nous préconisons donc de sensibiliser d’abord les individus pour qu’ils changent de comportements et permettent ainsi aux entreprises polluantes de changer leurs offres et d’évoluer vers moins d’activités polluantes. Certes, l’Etat pourra les guider mais il ne pourra pas engager un changement radical, cela se joue davantage au niveau du consommateur à travers le bio, le circuit court qui sont des alternatives concrètes.

Quelle est votre vision sur la grève des jeunes pour le climat du 15 mars?

Il n’y a pas eu de position claire des Républicains sur cette mobilisation. Mais nous sommes en général opposés à ce genre de méthode, puisque nous privilégions avant tout la discussion et non la simple opposition. Pour autant nous partageons totalement les préoccupations écologiques de ce mouvement. J’y suis d’ailleurs allé, à titre personnel pour parler avec les jeunes mobilisés.

Que pensez-vous des suites politiques et des réponses données à cette journée de mobilisation ?

Ce mouvement peut probablement avoir des suites politiques, en effet si le gouvernement n’entend pas les revendications d’un mouvement qui a mobilisé des milliers de jeunes, alors il renforcera l’image d’une élite vraiment déconnecté des réalités du pays.

Selon vous, la jeunesse est-elle la clé de la bataille contre le changement climatique, et peut-elle faire davantage bouger les choses, que ne le font les politiques ?

C’est à nous les jeunes de se saisir du problème, car nous serons les futurs citoyens qui auront à subir les conséquences du réchauffement climatique. Par contre, si il y a une vraie volonté de dénoncer, y-a-t-il une réelle volonté d’agir pour la jeunesse? Lors de la grève du 15, beaucoup étaient en train de filmer pour alimenter leurs flux insta, alors qu’on sait que la pollution numérique est très importante. Il y a donc un vrai décalage: d’un côté la jeunesse dénonce mais elle ne joint souvent pas l’acte à la parole. Les jeunes doivent donner l’exemple. Certains jeunes ont des initiatives géniales, comme celle de ce bateau qui vise à dépolluer les océans. Ce sont des Initiatives intéressantes qu’il faut encourager.

Pensez vous que l’UE a un rôle à jouer dans cette lutte ?

Techniquement l’Union Européenne est la seule qui a un rôle à jouer sur la question climatique. Si elle venait à légiférer, les dispositions seraient appliquées à tous les Etats membres. Mais les problèmes sont souvent méconnus et mal compris. Par exemple, les quotas de pêche ont été déterminés pas des fonctionnaires de Bruxelles qui ne connaissent rien aux réalités et qui ne conviennent pas réellement aux pêcheurs qui sont en concurrence en mer avec des acteurs étrangers. De plus si je pense que la question écologique va faire partie des enjeux du scrutin européen, ce ne sera pas le sujet numéro un.

Au delà des manifestations qui semblent plus symboliques, avez-vous pensé à d’autres formes de soutiens/mobilisations/actions de façon à alerter sur le dérèglement climatique ?

Au sein des Républicains nous préconisons davantage les actions qui viennent d’en bas. En tant que parti de gouvernement, nous avons beaucoup d’exécutifs locaux où les mesures mises en place sont plus proches des réalités du terrain. Xavier Bertrand a par exemple mis en place une prime pour convertir les moteurs diesel en dispositif bioéthanol au niveau régional. Nous préférons donc de petites solutions concrètes que des politiques trop générales et punitives.

Tractage des Jeunes Républicains du Nord pour les élections européennes devant la Faculté de Droit de l’Université de Lille le 3 avril

Entre la sortie des US de l’accord de Paris sur le climat, l’échec de la COP 24 etc… on a l’impression que la bataille de l’écologie est difficilement tenable ; selon-vous est ce le cas ou est ce un manque de volonté politique ?

Pour moi, la France est un modèle en terme de volonté politique sur l’écologie. Il est rare que je donne crédit au gouvernement socialiste mais depuis le Grenel de l’environnement de 2007, les différents gouvernements garde une constance dans la lutte contre le réchauffement climatique. Tout le monde dit qu’on fait pas assez, mais nous faisons souvent mieux que nos voisins européens. Donc certes il y a un manque de volonté politique sur cette question en Chine ou aux Etats-Unis mais pas chez nous!

Que pensez-vous de la réponse de M. Blanquer à l’annonce de cette grève pour le climat : engager des débats dans les classes à l’horaire de la manifestation ?

Si il y a un objectif concret derrière ces débats, cela peut être intéressant. On peut par exemple espérer qu’il y ait eu une restitution de ces discussions au gouvernement. Au niveau régional, en tout cas, nous n’avons pas été consulté.

Que diriez-vous aux jeunes qui refusent de se mobiliser ou ne se mobilisent pas ? Et aux gens qui ne voient pas d’intérêt dans cette grève pour le climat ?

La sensibilisation au problèmes écologiques est avant tout le fait d’une population éclairée, urbaine, le français rural lambda ne sait souvent pas grand chose ou ne s’y intéresse pas. Si c’est déjà trop tard pour certains qui ne pourront pas changer radicalement leur mode de vie, on peut cependant faire évoluer la jeunesse. Notre génération a pris conscience du problème par rapport à la précédente. Nous préconisons donc d’abord de passer par l’éducation, de mettre en place un enseignement des petits gestes concrets qui peuvent avoir des effets, dans le cadre de l’instruction civique. On arrivera jamais à un changement radical, puisque la seule solution efficace serait une diminution de la population.

Propos rapportés par Fantine Dufour et Alban Leduc