ÉDITO DE RENTRÉE – « Ah t’es à Sciences-Po ? Alors vous faites de la politique là-bas ? ». Vous avez peut-être entendu une phrase de ce style durant votre été. Le sens commun voudrait que cette réflexion soit logique, voir qu’elle puisse s’apparenter à une question bête. Et pourtant, ce n’est pas si simple.
Oui on étudie la politique à Sciences Po, mais peut-on vraiment en expérimenter les mécaniques ?
L’IEP présente sur ce point une situation pour le moins paradoxale. De prime abord, on ne peut qu’être surpris par le haut niveau de politisation, bien plus important que dans le secondaire. Pourtant, au fil de l’année, il apparaît rapidement que le débat politique n’est que très peu animé. En dehors de l’arène de l’IEP, des élections au CA (où nombre de candidats se déclarent même apartisans) ou de rares événements comme les blocages amenant à se positionner sommairement, il faut bien reconnaître que la vie politique est bien peu riche au sein de l’école. Si dans notre école, la parole politique fuse dans la sphère privée, cette dernière peine à s’exprimer en public. Une forte crainte d’éveiller des velléités, une crainte de rompre avec l’opinion supposée majoritaire. Mais spoiler, ce conformisme bien trop souvent dénoncé dans les grandes écoles, ce n’est pas par le mutisme qu’on le combat.
Inverser la tendance
Rappelons-nous, les Instituts d’Études Politiques ont été créés après guerre pour permettre aux futurs fonctionnaires de se forger un esprit critique. Or quoi de mieux pour se faire une idée critique que le débat contradictoire. Un débat permettant d’aller plus loin que les théories enseignées en cours ?
Face à ce constat d’une dépolitisation, certains accuseront l’administration de ne pas avoir assez encouragé les initiatives dans ce domaine, en refusant de subventionner des associations politiques par exemple. D’autres mettront davantage la focale sur les organisations corpos qui inculquent dès l’intégration la culture de l’amusement et du conformisme plutôt que celle du débat politique.
En vérité nous sommes tous responsables de cette situation, responsables par notre immobilisme. Dans une société qui retrouve un certain engagement politique en dehors des formes traditionnelles (manifestations contre le changement climatique, mouvement des Gilets Jaunes etc.), il est urgent pour les IEP, censés former les responsables politiques de demain, de se saisir de ce sujet et permettre l’existence d’un débat sain et renouvelé.
La Manufacture comme média d’expression d’idées
La nouvelle rédaction de La Manufacture se veut plus novatrice et plus proche de vous en portant une attention toute particulière aux sujets de proximité, au premier chef, l’actualité de l’école et la vie politique de la métropole lilloise.
La Manufacture s’engage cette année encore à favoriser le débat d’idées au sein de l’école. À Dépasser les simples commentaires vengeurs des réseaux sociaux et à élever le débat. Nous nous attacherons à relayer les informations utiles afin de permettre à toutes et tous de se faire une idée sur les enjeux de sa scolarité. Nous nous ferons par exemple l’écho des différents débats qui pourraient cette année animer les promotions. La Manufacture est et restera un journal ouvert aux tribunes de tout bord. Nos colonnes vous sont ouvertes ! La Manufacture est et restera un journal libre, sensible à la pluralité des expressions et soucieux de respecter l’intérêt général. Le tout en espérant lever le voile d’auto-censure qui semble drapper notre IEP.
L’année des opportunités
L’année scolaire 2019/2020 qui débute promet d’être une année politique particulièrement riche. L’année rêvée pour renouer le lien distendu avec la politique, avec les politiques. L’année rêvée pour s’engager, que ce soit auprès d’un parti, d’un syndicat ou d’une association. L’année rêvée encore pour écrire et parler des causes qui vous sont chères.
Les élections du conseil d’administration auront lieu en novembre et constitueront la première grande échéance. Comme l’année passée, La Manufacture tiendra à interroger sans distinction toutes les listes étudiantes nouvellement formées.La deuxième échéance est évidemment celle des Municipales, en mars 2020. Nous suivrons avec attention la course pour la prise du Beffroi, en tâchant là encore, de privilégier le fond à la forme. Une attention toute particulière sera apportée au respect des sensibilités politiques. Nous serons là pour interroger et demander des comptes aux différents candidats. Tous les volontaires qui le souhaitent pourront s’engager auprès de nous dans le suivi de cette campagne qui s’annonce passionnante.
Bien entendu, les événements politiques ne se limiteront pas à ces deux cas. Nul doute que des manifestations pour le climat continueront à avoir lieu à Lille et en France. Nul doute également que la crise sociale marquée par l’éruption des gilets jaunes promet encore des rebondissements. Les sujets politiques, sociaux, climatiques ne manqueront pas. C’est une période décisive qui s’ouvre : pour la survivabilité de la Terre, pour la lutte contre les inégalités, ainsi que pour garantir la sécurité en France et dans le monde.
Osons être critiques
C’est une aberration de penser, que face à des enjeux d’une telle ampleur, il n’y ait qu’une seule solution. Il nous semble essentiel de rappeler – et c’est peut être là l’une des qualités d’un bon journaliste – qu’il est indispensable d’avoir un minimum de recul sur ce que l’on entend, voit et lit.
Notre exhortation est simple : face à tous ces enjeux : ne soyons plus de simples témoins, soyons acteurs !
Le dynamisme, l’engagement et l’ouverture d’esprit constituent assurément le meilleur rempart face au conformisme. Cette incessante position critique est la clef d’un renouveau avec le politique.
Les rédacteurs en chef