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Côté Ciné #14 : Douze hommes en colère

Sélectionné pour préservation par le National Film Registry de la Bibliothèque du Congrès en raison de son intérêt « culturel, historique ou esthétique » et considéré par l’American Film Institute comme le deuxième meilleur film de procès, Douze Hommes en colère est un huis-clos brillant dans lequel douze jurés doivent délibérer sur le sort d’un jeune homme accusé de parricide, qui risque la chaise électrique, alors que tout les oppose. Ce film à la mise en scène théâtrale et claustrophobe a été réalisé par Sidney Lumet en 1957, et aujourd’hui encore, il reste un chef-d’œuvre brillant indémodable.

Côté réalisateur

Le réalisateur, Sidney Lumet, est un cinéaste américain né en 1924 et mort en 2011. Il était surnommé le « maître du polar juridique », puisque la plupart de ses films (près d’une cinquantaine !) traitent de près ou de loin du système judiciaire. Au cours de sa prolifique carrière, Lumet a remporté un Oscar d’Honneur en 2005 et a rédigé un ouvrage intitulé Making Movies, en 1995, dans lequel il s’appuie sur sa longue expérience de mise en scène pour donner des conseils et des enseignements. Il a réalisé, outre Douze hommes en colère, son plus grand film, Un après-midi de chiens, Serpico, New York, main basse sur la télévision, Le Verdict, A bout de course et 7h58 ce samedi-là. Connu pour avoir remporté de nombreuses récompenses, que ce soit aux Oscars, à la Berlinale ou aux Golden Globes, Lumet a fait travaillé les plus grandes stars d’Hollywood, que ce soit Katharine Hepburn, Paul Newman, Al Pacino, Ingrid Bergman ou encore Jane Fonda.

Côté scénar’

Etats-Unis, années 50. Douze hommes forment le jury d’un procès criminel, au cours duquel un jeune homme d’origine modeste est accusé du meurtre de son père et risque la peine de mort. Les jurés se retirent pour délibérer sur son sort, alors que toutes les preuves semblent accabler l’accusé. Ils procèdent d’abord à un vote, mais onze votent coupable alors qu’un seul des jurés décide de voter non coupable, statuant que la vie d’un homme nécessite quelques heures de discussion. La décision devant être prise à l’unanimité, ces hommes aux parcours et aux origines différentes doivent délibérer du sort d’un homme, alors que se mêlent dans les débats les préjugés et les motivations des jurés. Le scénario est l’adaptation d’une pièce de Reginald Rose, ce qui explique la théâtralité de la mise en scène.

Côté casting

C’est Henry Fonda, qui joue le rôle du juré n°8, celui qui tente de convaincre les autres jurés de la non-culpabilité de l’accusé, personnage donc assez proche de ceux que l’acteur a incarné, c’est-à-dire un héros intègre, en quête de justice et de paix. Fonda est également producteur du film, expliquant ainsi la « perfection » de son personnage, qui mène son raisonnement avec calme, sans jamais s’énerver, prêt à tout pour défendre l’accusé. Le reste du casting, pas aussi célèbre que Fonda, réunit entre autres, Martin Balsam, Lee J. Cobb, E.G. Marshall, Joseph Sweeney et Durkheim Begley.

Côté réalisation

Huis-clos en noir et blanc, Douze hommes en colère a une mise en scène très théâtrale. Sidney Lumet enferme ses personnages dans une pièce où il règne une chaleur étouffante (c’est la journée la plus chaude de l’année et le ventilateur est cassé). Les personnages ne peuvent pas sortir, s’énervent, se disputent, alors que l’enfermement pèse sur eux. Comme une pièce de théâtre, le film respecte la règle des trois unités de temps, de lieu et d’action. Lumet insiste également sur l’anonymat des personnages : aucun des jurés n’est nommé, sauf deux lors du plan final, ni même le juge ou l’accusé. Ces personnages d’opinion, de profession, d’intérêt et de niveaux sociaux ou de statuts très différents ne sont réunis que pour accomplir leur devoir et ne portent aucun intérêt aux personnalités des autres.

Côté recommandation

On vous recommande évidemment Douze Hommes en colère : c’est un film de procès culte qui fait partie des œuvres qu’il faut avoir vu au moins une fois dans sa vie. Tout au long du film, le.a spectateur.ice, en même temps que les personnages, est invité.e à évaluer sa propre image de soi au travers de la personnalité, des actions et des expériences des jurés. De par la diversité de ces hommes, on peut se retrouver dans certains d’entre eux. En outre, le film explore les difficultés à trouver un consensus parmi un groupe aux opinions divergentes, ce qui ajoute de l’intensité et du conflit dans le jugement de cette affaire. Lumet s’intéresse aussi à travers le personnage de Fonda au pouvoir que possède une personne à provoquer un changement d’avis chez un groupe d’individus et questionne . Bref, je vous le conseille fortement, rien que pour élargir sa culture cinématographique, mais surtout pour visionner un huis-clos brillant, de 95 minutes pendant lesquelles le sort d’un homme est entre les mains de douze jurés profondément opposés, qui tentent de démêler le vrai du faux dans cette sordide affaire.

Julie Schoose