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TRIBUNE – Pourquoi moi ? Pourquoi nous ?

©  Crédits photo : Noah Berger/AP/Sipa (https://lesjours.fr/obsessions/collapsologie-effondrement/ep1-fete-est-finie/?fbclid=IwAR3HYYEQUnGiZKnJINcRrRxqWRm603hrbFMg3SQ5rWwrUX3XoliQMuh_Ahg) 

 

J’ai 19 ans. Depuis quelques mois je m’intéresse énormément à la question écologique. Après avoir lu des dizaines d’articles, écouté de nombreuses interviews d’éminents scientifiques, dévoré des ouvrages, m’être engagé concrètement, ma vision actuelle du monde est… confuse.

 

Le monde tel que nous le connaissons aujourd’hui va radicalement changer, quand exactement les scientifiques ne peuvent le prédire, en revanche ils nous expliquent très bien les conséquences du réchauffement climatique, de la pollution des mers et des airs, de la perte de biodiversité, mais aussi le verrouillage du système politique et financier actuel, les ressorts de la psychologie humaine, et enfin les limites géo-physiques de notre planète. Pas besoin de vous rappeler que ces conséquences sont catastrophiques et presque inévitables.

 

Dans tous les cas ce bouleversement sera familier à notre génération, que ce soit en 2030, en 2050 ou en 2100.

 

J’étais jeune, plein d’espoirs, de projets et de doutes certes mais tout de même confiant dans l’avenir et prêt à déployer mes capacités.

Aujourd’hui je suis toujours jeune, ce monde qui court à sa perte me promet toujours l’avenir mais d’un avenir il n’y en aura pas, ou du moins pas tel que nous ne nous l’imaginons. Fini la volonté de s’insérer dans le marché du travail, d’avoir une vie heureuse, de subvenir à ses besoins et de profiter de la vie…

 

Un grand soulagement finalement. Une forme de sérénité intérieure m’envahit. Un monde incertain se profile, rempli de drames, d’événements traumatiques et inattendus certes, mais surtout un monde nouveau.

 

Adieu ce système économique destructeur et inhumain, tourné vers la rationalisation du travail et le profit à l’infini.

Adieu cette société qui s’accommode de l’opulence d’une petite partie de la population et de la misère et la médiocrité des autres.

Adieu ce système politique vicieux, fondé sur des illusions et des constructions, prétendument démocratique, entièrement consacré à sa reproduction et incapable de répondre aux défis environnementaux.

 

Nous sommes né.e.s au beau milieu d’une période historique, de la fin de notre civilisation thermo-industrielle vers… quelque chose. Notre monde s’effondre devant nos yeux, mais pour tout biologiste le corollaire de l’effondrement, c’est la renaissance.

A nous d’inventer, à la fois dans la théorie et dans la pratique, ce monde nouveau.

La tâche est immense, peut-être insurmontable, la tâche est dure, la tâche est injuste, mais nous avons toutes les clés en main pour créer entièrement le monde que l’on veut.

 

Quelle personne ayant encore toute la vie devant elle aurait pu rêver mieux ?

 

« L’utopie a changé de camp : est utopiste celui qui croit que tout peut continuer comme avant. »

Pablo Servigne dans Comment tout peut s’effondrer (2015), Editions le Seuil.

 

PS : ce texte est avant tout l’expression d’un ressenti. Je ne prétends absolument pas délivrer une quelconque vérité sur l’état actuel du monde, c’est un point de vue. Le diagnostic que je fais de celui-ci est très rapide et peut-être réducteur mais il résume grosso modo ma pensée. Je serais ravi d’en discuter avec vous et d’éventuellement vous transmettre toute la documentation qui m’a amené à penser cela.

Enfin j’omets tout l’aspect social de la question écologique. Je n’oublie pas l’enseignement de Bourdieu, la jeunesse n’est qu’un mot et mobiliser l’ensemble de la société, y compris les couches les plus défavorisées, est une question cruciale mais extrêmement complexe, sur laquelle j’ai n’a pas encore pu raisonnablement produire d’avis. Mon but est de partager et d’échanger, dans la mesure où je considère que nous aurons cruellement besoin de plus solidarité à l’avenir.

Nicolas Lebrun